Résumé de la 3e partie n Grâce à une petite rente léguée par son père Georgie-Ann vit, en recluse chez elle, pendant 5 années consécutives... Je cuisinais. Je lisais. Je me coupais moi-même les cheveux. Grâce aux catalogues de vente par correspondance, aux courses par téléphone, aux livres, aux abonnements, aux journaux et magazines, tout ce dont j'avais besoin venait directement à ma porte. Je ne désirais pas aller voir au-dehors. Le monde extérieur ne me manquait pas. J'étais tout à fait satisfaite. Ce qui n'était bien entendu pas le cas de ma mère. Elle m'appelait jour et nuit. — Georgie-Ann, c'est aberrant. Il faut que tu sortes. Tu ne peux pas renoncer à la vie. — Mais j'ai une vie, maman. La mienne. Elle ne recula devant aucun subterfuge. Elle prétendit être mourante. J'attendis, et elle ne mourut pas. Elle m'offrit un voyage de luxe autour du monde. Je restai de marbre. Elle me fit savoir que le président des Etats-Unis était en ville et qu'il venait dîner chez eux. — Vraiment, maman, tu exagères... Le lendemain, c'était écrit noir sur blanc, dans la Bannière de Nashville. Le Président et la première dame du pays, ainsi que le plus séduisant des conseillers du président – et célibataire, faut-il le préciser ? – avaient effectivement dîné avec ma mère et mon beau-père Jack, un des principaux collecteurs de fonds du Tennessee. — Je regrette vraiment d'avoir loupé ça, avouai-je. Et c'était le cas. Pour le couple présidentiel, j'aurais fait l'effort surhumain de sortir. Je n'aurais pas dû l'avouer. Ma mère y vit une faille dans mon système de défense. Cela la rendit encore plus offensive. Et elle me contraignit par le feu à sortir de ma retraite. Elle n'avoua naturellement jamais, mais toujours est-il qu'un soir, au lendemain de la visite du Président, quelqu'un alluma un feu devant ma porte de service. Les flammes consumèrent tout l'appartement rempli de meubles rembourrés, de vieilles dentelles et de rideaux vaporeux – en vingt minutes, montre en main. Par miracle, les autres appartements furent épargnés. J'eus à peine le temps de saisir au passage quelques vêtements, l'argenterie léguée par ma grand-mère et mon chat Wabash. Où est-ce que j'allais bien pouvoir aller ? Chez ma mère, vraisemblablement, vu qu'elle et Jack surgirent fort à propos, mon beau-père numéro cinq guidant sa bonne vieille Mercedes entre les camions de pompiers. Mes voisins les avaient avertis par téléphone, expliqua ma mère. — Foutaises, lançai-je sèchement. Tu as mis le feu chez moi. — Oh, Georgie-Ann, qu'est-ce que tu vas imaginer ? Viens habiter chez nous, à Belle Meade. Tu disposeras pour toi toute seule de l'aile réservée aux invités. Tu ne nous verras même pas. N'ayant guère le choix, je la pris au mot. J'allai squatter leur hôtel particulier de briques rouges, situé dans la rue la plus chic du quartier le plus chic de Nashville. Mais pas pour longtemps. (à suivre...)