Danger n On entend, de loin, le bruit assourdissant du déboulement de pierres sur un versant de montagne sans avis préalable, sans autorisation et sans les précautions d'usage. Des jeunes arrivent à calibrer, amasser après extraction en plein soleil des pierres d'une carrière abandonnée par l'ex-DNC. Le vacarme des camions remplissant leurs bennes affole jusqu'aux vaches qui passent par-là. Les risques d'avalanches ne sont pas à écarter tout comme les glissements de terrain qui pourraient obstruer l'unique passage avec des conséquences désastreuses pour l'exploitation des lopins de terre. Une rivalité entre bandes de jeunes casseurs de pierres et exploitants agricoles a eu pour conséquence, tout dernièrement, de déclencher un incendie emportant des arbres fruitiers chez Abdelhamid qui n'a pour seul revenu que le produit de la vente des herbes, légumes et fruits. «Je n'ai bénéficié d'aucune aide de l'Etat et je n'arrive pas à démarrer un quelconque élevage», dira-t-il en montrant un espace fermé pouvant servir d'écurie ou de poulailler et qui est lamentablement vide. Sidi El-Kebir a vu son oued détourné et asséché, ses montagnes exploitées et ses enfants contraints au chômage et à la survie. Ces jeunes, pour disposer d'argent de poche ou pour assister leurs parents dans le combat quotidien contre la cherté de la vie, s'exposent à tous les dangers dans l'extraction de la pierre revendue 3 km plus bas, à Blida, ou dans les communes limitrophes de Bou Arfa et Beni Mered. Avant l'arrivée au mausolée et sur la rive de l'oued, un terrain vague servant de stade, dégagé au voisinage de l'école, n'a pu avoir un statut réglementaire malgré des promesses tenues en 2005 par un autre exécutif, juste après que les vestiaires et les douches eurent été emportées par les eaux. Un club est bien en projet d'affiliation à la ligue de football de la wilaya, mais tout lui manque puisque rien n'existe. «Personne ne vient pour nous expliquer comment procéder et notre faciès n'inspire pas confiance.» Ce jeune en veut à tout le monde et se réfugie le soir dans la fumée de quelques joints. «Personne n'a touché l'aide à la construction rurale hormis ceux qui n'en ont pas vraiment besoin, mais il faut dire qu'il n'y a personne du village qui occupe un poste de responsabilité à la wilaya», avancera un autre jeune. Les jeunes survivent dans cet espace fermé ne menant nulle part. Ils vendent des légumes frais dans les rues étroites du souk de Blida, proposent leurs services comme manutentionnaires devant les étals de Bab Rahba, gardent des parkings pour le compte de quelques gros bras ou proposent quelques joints à d'autres jeunes avides de sensations. Enracinement et résistance peuvent être également le credo de ces quelques milliers de personnes qui sont Algériennes et Algériens, fiers de rester sur leurs terres et fiers de ne pas tendre la main. Denis Martinez et son équipe, venus en 2006, avaient, par leur présence, sorti quelque peu l'endroit de sa léthargie «L'eau semence de la vie», comme l'écrivait Nourredine Saâdi dans la supplique à Sidi Ahmed El-Kebir, se révèle juste pour cette terre qui a vu son eau captée et transmise plus bas à la ville par les voies souterraines, ôtant ainsi mouvement et vie aux rives de l'oued asséché. Même le groupe Nestlé a foré deux puits et dispose de millions de litres d'eau sans que la contrepartie pour la population locale soit palpable en nombre d'emplois créés. On parle d'une trentaine de jeunes de la région incorporés, la plupart, comme surveillants, manutentionnaires ou femmes de ménage.