Les bibliothèques ont toujours joué un rôle important dans la culture musulmane. Il est bon, avant de parler de l'interprétation de la bibliothèque dans l'Islam, d'évoquer son rôle dans la civilisation musulmane. On connaît le célèbre hadith du Prophète : «Demandez la science, même si vous devez aller en Chine.» La Chine, c'était, à l'époque, ce qu'il y avait de lointain. Mais les musulmans, le prenant à la lettre, sont allés chercher les livres partout. Les premiers califes encouragèrent la création de bibliothèques (maktaba, pluriel makâtîb), mais c'est à l'époque abbasside que ces centres de formation, de traduction et de diffusion de la culture et des sciences se développèrent. La plus grande de l'empire musulman fut longtemps le Bayt al H'ikma (la Maison de la Sagesse) construite en 815 par le calife al Ma'mûn. L'édifice, destiné à abriter une école de traduction, possédait un observatoire et une bibliothèque contenant plusieurs milliers d'ouvrages. Le fonds initial était constamment enrichi par les traductions que fournissaient une armée de chercheurs et de savants employés par l'Etat. La bibliothèque compta, dans ses beaux jours, jusqu'à deux millions d'ouvrages. Le Bayt al H'ikma ferma ses portes à la fin du règne des Fatimides, en 1171. Leurs successeurs, peu portés vers les œuvres de l'esprit, vendirent aux enchères les trésors de l'institut. Beaucoup de livres, sans doute uniques, furent également détruits, mais la plupart furent récupérés et entrèrent dans la constitution de nouvelles bibliothèques.