Résumé de la 1re partie Mme Parmentier a tiré sur son mari. Ensuite, elle s?est dénoncée à la police. Suivent quelques notes tapées à la machine et la photo d?une petite fille qui paraît plutôt jolie, attendrissante, bien qu?elle tienne une main bizarrement fermée sur son ?il gauche. Il est midi. Le policier n?a pas le temps de lire ces notes. D?ailleurs, cela n?a rien à voir avec l?enquête. Il reprend donc rapidement, presque machinalement, le cours de ses investigations et quitte l?appartement du boulevard Malesherbes une demi-heure plus tard. L?après-midi, chez le magistrat chargé de l?instruction, sont réunis Mme Parmentier, son avocat et le policier. Dans une affaire aussi simple, l?instruction n?est qu?une formalité qui doit permettre à la justice de suivre son cours. Mme Parmentier est une grande femme très intelligente, blonde de type nordique, solide et réservée. L?image même de la bourgeoise tranquille. Pas du tout le genre de femme destinée à se retrouver un jour devant le juge d?instruction. Elle a dû être assez belle et, à l?approche de la cinquantaine, il lui reste un certain charme. Le policier l?observe tandis qu?elle répond aux questions du juge. Plus que la jalousie, c?est le désespoir sans doute qui a poussé cette femme à tuer son mari. «Lorsque vous avez tiré, aviez-vous l?intention de le tuer ? demande le juge d?instruction. ? Non? Oui? Je ne sais pas.» Manifestement, elle répond avec une sorte d?indifférence, le regard perdu, ne voyant personne, retenant ses larmes. Elle a d?ailleurs les yeux gonflés, rougis d?avoir beaucoup pleuré. L?avocat s?agite sur son siège : «Ma cliente n?avait certainement pas l?intention de tuer son mari, ça n?a été qu?un geste de colère provoqué par un désespoir bien compréhensible.» C?est alors que le vieux flic ne peut s?empêcher de faire une remarque. Remarque un peu déplacée, sans doute, car elle semble étonner l?avocat et le juge d?instruction : «Vous croyez, maître, que l?infidélité d?un homme, ça vaut ça ? Enfin, je veux dire, explique-t-il, est-ce que ça mérite un tel désespoir ? Et la suite ? Non seulement sa mort mais tout ce qui va arriver maintenant à votre cliente ?» Mme Parmentier, cette fois, le regarde. Elle a les yeux bleus. Elle se tait quelques secondes comme si elle réfléchissait. Puis, répond de sa voix douce de femme bien élevée : «Je suis une femme oisive. Je me suis mariée très jeune. j?ai eu un fils qui, maintenant, n?a plus besoin de moi. Je n?ai pas besoin de gagner ma vie, d?ailleurs je ne sais rien faire. Je me fais souvent l?effet d?être un parasite, mais les parasites ne sont pas des êtres plus heureux que les autres. Ma vie dépendait entièrement de celle de mon mari, de son affection, de sa présence. Lorsque j?ai compris que je lui étais devenue indifférente et qu?il allait partir, s?il ne m?avait pas mise en colère, ce n?est pas sur lui que j?aurais tiré, mais sur moi !» C?est alors que le policier repense à la lettre qu?il a trouvée ce matin dans le petit secrétaire du boulevard Malesherbes. Un papier sans importance sans doute. Quand il était enfant il mettait de côté le papier d?argent qui enveloppe le chocolat pour les petits Chinois. Son fils a vendu des scoubidous pour les victimes d?un tremblement de terre. Il y a comme ça dans chaque famille des bonnes ?uvres qui traînent. Mais tout de même, celle-ci a un nom, et pas un nom de chose, un nom d?enfant : Nurjhan. Et Nurjhan a un visage. Au fait, pourquoi tenait-elle cette main fermée sur son ?il gauche ? se demande le policier. Lorsqu?ils sortent du cabinet du juge d?instruction, Mme Parmentier est inculpée. Le juge n?a pas été trop méchant. Il n?a pas retenu la préméditation, il a admis qu?elle avait provoqué la mort sans intention de la donner. (à suivre...)