Résumé de la 5e partie Mme Parmentier entre dans le box des accusés, debout, elle entend lire l?acte d?accusation. Dans la salle des assises, onze jurés regardent Mme Parmentier. A Dacca, au bord du trottoir, le cadavre d?un homme couvert de guenilles : les passants jettent dessus quelques sous et quand il y en aura assez, on achètera la natte pour le rouler dedans et l?enterrer. Aux assises, défilé des témoins, effet de manchettes. Au Bangladesh, la femme du vieux policier roule le long du Bramapoutre, sur la rive la plus haute, au milieu des paysans affamés qui regardent depuis des jours l?autre rive, inondée. Lorsque le toit de leur maison réapparaîtra, ils crieront de joie. Aux assises, la Cour, solennellement, s?éclipse. Le public clairsemé se lève. C?est un procès sans intérêt. Demain, pour connaître la sentence, il n?y aura pas grand monde. A Bhalukapara, il fait nuit quand arrive enfin, plus morte que vive, la grosse femme du vieux policier. Des gens en quête de nourriture assiègent la mission. Les bébés pleurent sur le sein desséché de leur mère. Tous ont froid : ils ont vendu leurs vêtements pour survivre. S?ur Mathilde, seule «dispensatrice» de soins dans toute la région, leur fait distribuer un peu de lait dans lequel elle a fait cuire des épluchures de légumes et râpé deux ?ufs durs. Le lendemain, lorsque Mme Parmentier entre dans son box, les jurés sont surpris de son air absent. Pour un peu, ils croiraient voir sur ses lèvres un imperceptible sourire. Assise sur une marche de la véranda, la grosse femme du vieux policier voit arriver de loin une petite fille vêtue du pantalon et de la chemise blanche que Mme Parmentier et elle lui ont envoyés. Tout de suite, elle comprend combien elles ont été stupides d?envoyer du blanc. Nurjhan tient la main sur son vilain ?il gauche pour le cacher. L?enfant s?arrête à deux pas de la grosse dame qui lui dit «bonjour». L?enfant répond avec quelques mots de français qu?elle connaît, auxquels la grosse dame ne comprend rien, sinon «marraine» qui revient plusieurs fois. La grosse dame se tourne vers s?ur Mathilde : «Dites-lui que nous sommes deux marraines. L?autre l?aime aussi beaucoup, beaucoup. Mais elle n?a pas pu venir.» Un procès sans intérêt se poursuit aux assises, avec son armée de juges et de jurés, d?huissiers et de greffiers, de journalistes et de photographes qui s?agitent autour d?une femme indifférente. Au Bangladesh, la grosse dame a pris la décision de conduire Nurjhan à l?hôpital de Mymensingh. Là, on lui enlèvera son ?il et on lui en mettra un autre, en plastique. Non seulement elle cessera de souffrir, mais elle n?éprouvera plus le besoin de le cacher avec sa main. La grosse femme du vieux policier aimerait bien ramener en France la petite fille. Mais on le lui déconseille. Alors elle reste une semaine à regarder Nurjhan devenir de plus en plus joyeuse. Enfin, elle est comme tout le monde. Elle se regarde dans la glace et se trouve très jolie. Vient l?heure de la séparation. La grosse dame et l?enfant sont assises par terre, l?une en face de l?autre : «Tu reviendras ? lui demande péniblement l?enfant, avec son curieux accent. ? Moi je ne sais pas. Peut-être. Mais ton autre marraine sûrement. ? Sûrement ? ? Elle te le promet. Et tu verras, elle est très gentille. ? Quand ? ? Dans dix-huit mois.» Ce matin, la grosse dame a reçu un télégramme de son mari le vieux policier : Mme Parmentier a été condamnée à trois ans de prison avec sursis.