InfoSoir : Quel constat faites-vous du phénomène de la violence contre la femme ? l Nafisa Lahrache : Selon les statistiques de la Sûreté nationale, ce phénomène est classé comme suit : la violence conjugale occupe la première place, la violence à l'égard des mineures (un jeune qui viole sa petite amie ou copine, par exemple), arrive en deuxième position, le harcèlement sexuel en milieu professionnel est classé au troisième rang. Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le nombre de femmes victimes de violence sexuelle augmente chaque année, sauf qu'il faut reconnaître que beaucoup d'entre elles hésitent à recourir à la procédure judiciaire pour poursuivre leurs bourreaux. Peut-être en raison de l'obligation de fournir une preuve, mais aussi à cause des préjugés et des stéréotypes qui caractérisent notre société et qui induisent une sorte de peur chez les victimes qui refusent de dénoncer ces actes criminels. Au travail, il est rare que la victime signale le harcèlement, d'abord parce qu'elle n'a pas de preuve matérielle, et même si elle en a, parfois, cela risque de se retourner contre elle et de victime elle devient coupable. En outre, les gens témoignent peu, car ils ont peur de perdre leur travail. C'est pourquoi la loi doit évoluer pour assurer la protection des témoins. A qui incombe la faute ? l C'est la responsabilité de tout le monde, pas uniquement des organisations et des associations. Prenons l'exemple de la femme qui est battue par son fils. Est-ce une honte de dénoncer le fils ? Non ! La femme qui l'est par son mari doit également se défendre en s'adressant à la justice. En outre, il faut savoir que la société est en train de traverser une période difficile et une crise multiforme et multidimensionnelle. Sur le plan social, la dégradation des valeurs, la perte des repères, le manque de sensibilisation font que beaucoup de jeunes filles mineures sont seules responsables de leur comportement. Les choses doivent changer. En vérité, l'homme n'est pas l'ennemi de la femme, il est sa moitié. Hier, hommes et femmes, côte à côte, ont combattu le colonialisme. Aujourd'hui, c'est l'Algérie qu'ils doivent bâtir ensemble. La pauvreté n'est-elle pas en cause ? l Dire que les agresseurs ou les violeurs sont généralement issus des milieux défavorisés ou vivent des conditions socioéconomiques difficiles n'est pas tout à fait faux. Mais ce n'est pas tout à fait juste, non plus. Le chômage, le décès du père, la drogue, la frustration y sont pour quelque chose… Mais il existe de nombreux facteurs à prendre en considération. L'agressivité en milieux scolaire et estudiantin est une autre forme de violence depuis que certains enseignants en usent, ce qui a engendré une forme de réciprocité en matière de brutalité dans un milieu censé être celui du savoir et de la connaissance. *Présidente de l'association femme en communication