Résumé de la 2e partie n Raphaël Matta débarque à Abidjan pour occuper son nouveau poste de responsable de la nouvelle réserve d'Afrique occidentale... Mais elle (Mme Matta) se reprend et, avec l'aide des habitants de Bouna, la case devient à peu près habitable. Le lendemain, Raphaël Matta recrute un assistant. C'est un Noir de haute taille aussi puissant que malin, Rémi Sogli, un ancien adjudant de l'armée française. Il connaît le pays mieux que quiconque et il le renseigne sur la situation, notamment en ce qui concerne les éléphants. — Ce sont les hommes des tribus qui les tuent. Ils sont là depuis toujours. C'est le pays de leurs ancêtres, c'est leur pays. Il faut les comprendre... — Mais ils ne tuent pas pour se nourrir. Ils vendent l'ivoire à des trafiquants. — C'est vrai. C'est leur seule ressource. Tu auras du mal à les faire arrêter. — Je leur dirai qu'ils doivent cesser, s'ils veulent que leurs enfants aient plus tard la chance de voir encore un éléphant. Sogli garde prudemment le silence et, en sa compagnie, Raphaël Matta se met en devoir d'explorer sa réserve, grande comme la Corse. Il stupéfie le Noir par sa témérité. Il n'a, en particulier, aucune peur des animaux. Il s'approche des éléphants et même des lions à quelques mètres et, s'il porte une carabine en bandoulière, jamais il ne tire un coup de feu. Sogli lui en fait la remarque : — Pourquoi avoir une arme, si c'est pour ne pas t'en servir ? Raphaël Matta lui répond ce qui constitue sa philosophie : — Je suis armé pour me défendre éventuellement contre les hommes. Mais je ne tirerai pas contre les animaux. Ce serait une trahison. Ils ne me le pardonneraient pas et le charme serait rompu. Le temps passe. La vie s'est organisée à Bouna. La maison a été retapée. Elle possède à présent un toit neuf et quelques pièces. Elle est même si confortable que les Matta ont fait venir leurs enfants. Mme Matta leur fait la classe en même temps qu'aux petits du village. Dans le même temps, le travail de Raphaël Matta a progressé d'une manière remarquable : il a amélioré les voies de communication, nommé des agents de l'Administration dans les principaux villages. Il a surtout fait ce qui lui tient le plus à cœur : le recensement de la faune qui vit sur son territoire. Au cours de marches harassantes, il a dénombré environ cinquante mille antilopes, dix mille bubales, deux mille hippopotames, un nombre indéterminé mais important de crocodiles, trois cents lions et un millier de panthères. Quant aux éléphants, ils ne sont malheureusement pas plus d'une centaine, répartis en huit troupeaux. Ce sont eux qui sont les plus menacés, en raison de leur ivoire. Depuis le début du séjour de Raphaël Matta, leur nombre a décru d'une dizaine d'unités. Ce sont eux qu'il faut protéger en premier, et il jure de s'y employer. Ce ne sera pas facile, car, en même temps que les bêtes, Raphaël Matta a recensé les chasseurs. Huit mille membres des diverses tribus possèdent un fusil qu'ils ont déclaré aux autorités et avec lequel il leur est permis de chasser pour se nourrir. A ceux-là, il a tenu le petit discours qu'il avait mis au point à son arrivée et il a été plutôt bien écouté, sans doute en raison du prestige qu'il s'est acquis. Son courage, sa familiarité avec les animaux sont tels qu'ils lui ont valu auprès des populations indigènes le surnom de «Congo Massa», c'est-à-dire le «roi de la forêt». Mais il y a les autres, les autres chasseurs qu'il a également recensés. Ils sont plusieurs milliers, c'est tout ce qu'il peut dire. Eux, ils n'ont pas entendu ses discours, ils fuient dès qu'ils l'aperçoivent et ils massacrent quand il n'est pas là. (à suivre...)