Ecriture n Après Zorna, paru aux éditions Chihab, Jaoudet Gassouma publie, aux éditions Alpha, ce deuxième roman. Ce roman écrit «dans un style tantôt poétique tantôt imagé où se confondent beauté du vers et force du détail» s'organise telle une saga où sont racontées plusieurs histoires, dont celle en particulier d'une jeune femme, Mina, qui, amnésique et frappée sur un mauvais coup du sort d'aliénation à la fois mentale et mémorielle, prend son mari, Titiss, pour son frère et sa fille, Tsériel, pour sa nièce. Le roman est aussi l'histoire de la petite fille, Tsériel, qui, curieuse, pertinente et attentive, se plaint à sa grand-mère, Bniqa, du manque d'amour de sa mère et de l'absence de son père – celui-ci est certes présent, mais ne prête pas attention à son enfant. Tsériel se trouve perdue dans les méandres d'une existence dépourvue de repères. Elle souffre de l'absent. Curieuse et pertinente, elle demande alors à sa grand-mère ce qui ne va pas bien chez sa mère. La grand-mère explique à sa petite-fille que sa maman, si elle ne la reconnaît pas, c'est parce qu'elle a perdu la mémoire, et que celle-ci se trouve quelque part dans une rue, chez un certain vieux. Ainsi, Tsériel, l'enfant de l'amnésie, s'en va, dans un élan d'innocence et de pureté, quêter cette mémoire perdue dans les profondeurs de la ville – Tsériel considère la mémoire de sa mère comme une chose matérielle comme elle la considère également comme le remède au mal qui ronge cette dernière – pour la faire restituer à sa mère. Oscillant entre réalisme et fiction, Tsériel, ou les yeux de feu est un roman de l'absence – et de l'absent. Un roman de la mémoire : Tsériel, en allant à la recherche de la mémoire de sa mère, s'embarque en fait dans une quête de sa propre mémoire. Tsériel se cherche à travers sa mère et son passé familial. Son seul point de repère est Bniqa, sa grand-mère – celle-ci est d'ailleurs le point de conjonction vers lequel convergent aussi tous les autres personnages, notamment Titiss et Mina. Bniqa – ce vocable signifie dans le parler algérois ce foulard par lequel les femmes enroulent leur chevelure dans le hammam – se révèle l'ancestral, l'histoire. Bniqa se veut aussi un personnage identique à une conteuse, puisqu'elle raconte à Tsériel, sa petite-fille, des histoires anciennes et étonnantes, parfois singulières et insolites. Le roman, qui interpelle la réalité, l'histoire, la mémoire et, du coup, nous interpelle, comporte autant d'éléments fantastiques qu'extravagants. C'est un roman fantastique en fait. Il se lit comme un conte magique, voire une fable des temps modernes où la magie opère dans une imagination frétillante d'émotions et de résurgences mémorielles. C'est un roman truculent et savoureux, sémillant et à tempérament.