Résumé de la 20e partie n En voyant l'ambiance conviviale du petit-déjeuner, Tuppence émet de sérieux doutes quant à la présence de la 5e colonne au Sans Souci... Oh ! miss Minton était vraiment trop aimable, mais Mrs Blenkensop se savait si malhabile dès qu'il s'agissait de tricot, si incapable de suivre un modèle... Au vrai, elle n'était guère capable que de tricoter des ouvrages simples, comme des passe-montagnes – et encore, lui semblait-il, il y avait quelque chose qui clochait. Ça clochait, n'est-ce pas ? Miss Minton examina d'un œil expert l'informe masse kaki. Et, avec tact, elle désigna les mailles fautives. Pleine de gratitude, Mrs Blenkensop confia aux mains agiles de miss Minton, rayonnante d'un savoir-faire un peu condescendant, le passe-montagne défectueux. Oh ! non, ça n'ennuyait pas du tout miss Minton ! Cela faisait tant d'années qu'elle tricotait ! — Je dois reconnaître, avoua Tuppence, que je ne m'y étais jamais mise avant cette horrible guerre. Mais on a parfois le sentiment d'être tellement inutile qu'on ferait n'importe quoi, non ? — Ça, c'est bien vrai. Et vous avez un fils dans la Marine, d'après ce que j'ai cru comprendre hier soir ? — Oui, mon aîné. Un garçon tellement merveilleux – même si ce n'est pas à sa mère de le dire. J'en ai un autre dans la Royal Air Force, et Cyril, qui est encore un peu mon bébé, se trouve quelque part en France. — Seigneur Jésus, comme vous devez être inquiète ! «Derek, mon Derek adoré, pensa Tuppence. Là-bas, dans l'enfer – pendant que je suis ici à faire l'idiote... à singer une angoisse que je ressens au plus profond de moi...» Mais elle adopta son ton le plus vertueux : — Il nous faut tous faire preuve de courage, n'est-ce pas ? Espérons que ce sera bientôt fini. Je me suis laissé dire l'autre jour – et par quelqu'un de très haut placé – qu'au point où ils en sont, les Allemands ne tiendront plus deux mois. Pour marquer son approbation, miss Minton branla du chef avec tant de vigueur que ses chaînes et ses perles tintinnabulèrent. — Sans l'ombre d'un doute. Je suis d'ailleurs persuadée, souffla-t-elle d'un ton de conspirateur, que Hitler souffre de troubles profonds... qu'il est incurable... qu'avant août on lui passera la camisole... — Ce Blitzkrieg, s'emballa Tuppence, c'est vraiment le dernier sursaut des Allemands. D'après ce qu'on raconte, les restrictions sont épouvantables, chez eux. Dans les usines, les ouvriers se révoltent. La machine de guerre va s'effondrer. — Quoi ? Qu'est-ce que vous chantez là ? C'était Mr Cayley, accompagné de sa femme, qui faisait son entrée sur la terrasse. Il s'installa dans un fauteuil et Mrs Cayley lui posa une couverture sur les genoux. Il répéta sa question d'un air de commisération : — Comment ça ? Qu'est-ce que vous racontiez au juste ? — Nous disions, répondit miss Minton, que tout serait terminé cet automne. (à suivre...)