Résumé de la 26e partie n Haydock décide d'inviter Tommy et le major chez lui, au Repos du contrebandier... L'ancienne jetée se trouvait au bout extrême du front de mer, endroit que les agents immobiliers du cru considéraient avec quelque mépris. Il s'agissait de West Leahampton, et nul n'en pensait grand bien. Tommy paya deux pence et put parcourir l'ancienne jetée. Dans un état proche de l'abandon, les installations destinées aux loisirs se résumaient à quelques rares machines à sous prêtes à rendre l'âme. L'endroit était désert ou presque. Quelques gamins jouaient à se courir après avec des cris aussi perçants que les piaulements des mouettes. A l'extrémité, un homme, solitaire, s'adonnait à la pêche. Arrivé près de lui, Mr Meadowes s'abîma dans la contemplation des vagues, en contrebas, puis interrogea doucement : — Ça mord ? Le pêcheur secoua la tête. — Je n'ai pas fait beaucoup de touches. Mr Grant moulina un peu sa ligne et reprit, sans se détourner : — Et vous, Meadowes ? — Pas grand-chose à rapporter, monsieur, répondit Tommy. Pour l'instant, je fais mon trou. — Très bien. Racontez-moi ça. Tommy choisit de s'asseoir sur un bollard proche, d'où il pouvait surveiller l'ensemble de la jetée. — J'ai plutôt bien commencé, je crois. Vous devez déjà avoir la liste des pensionnaires ? Grant acquiesça d'un hochement de tête. — Mais pour le moment, mon rapport sera creux, poursuivit Tommy. J'ai fait ami-ami avec le major Bletchley. Nous avons joué au golf ce matin. Apparemment, il a tout de l'officier à la retraite archibanal. A la limite, un peu trop banal... Quant à Cayley, c'est le type même du malade imaginaire. Mais, là aussi, ça pourrait être un rôle assez facile à tenir. Et il reconnaît lui-même qu'il a passé pas mal de temps en Allemagne ces dernières années. — A retenir, lâcha Grant, laconique. — Et puis il y a ce von Deinim. — Oui. Inutile de vous dire, Meadowes, que c'est von Deinim qui m'intéresse le plus. — Vous pensez que N, c'est lui ? — Non, je ne crois pas. D'après moi, N ne peut pas s'offrir le luxe d'être Allemand. — Même pas Allemand réfugié ? Même pas. Nous tenons à l'œil tous les ressortissants du Reich, et ils le savent. Qui plus est – et ça, c'est strictement confidentiel, mon cher Beresford –, tous ceux qui se trouvent dans la tranche d'âge des seize à soixante ans vont être très bientôt internés. Que nos adversaires le sachent ou non, ils doivent bien prévoir qu'un coup pareil peut leur tomber dessus. Or ils ne peuvent pas courir le risque de voir le chef de leur organisation se retrouver dans un camp d'internement. C'est pourquoi N doit être soit neutre, soit – au moins apparemment – Anglais. Idem pour M... Non, ma petite idée en ce qui concerne von Deinim, c'est qu'il pourrait bien constituer l'un des maillons de la chaîne. Que N ou M soit ou non à Sans Souci, importe peu. (à suivre...)