Réalité n Les faux exorcistes, qui font de cette pratique un moyen facile de gagner de l'argent, sont légion. Ce qu'il faut d'abord éviter, c'est de confondre entre l'acte de la roqia et la médecine traditionnelle. Le premier est une pratique religieuse qui ne peut pas être exercée par le premier venu. Quant à la médecine par les plantes, elle est le plus souvent un héritage familial. Aujourd'hui, les coûts des produits pharmaceutiques et l'inefficacité de certains médicaments à base chimique font que beaucoup de gens se tournent vers la médecine par les plantes qui s'avère, parfois, être efficace. Bien entendu, là aussi il faudrait que les gens fassent attention, car beaucoup de pseudo-guérisseurs sans scrupules prescrivent n'importe quelle plante pourvu que cela rapporte. Donc, le seul point commun qui les unit reste le fait qu'elles soient toutes les deux noyautées par les charlatans. La pratique de la roqia est devenue presque une profession à part entière, avec l'ouverture de bureaux d'accueil pour les clients, auxquels on distribue des cartes de visite et fixe des rendez-vous. Sans oublier, bien entendu, les tarifs fixés au préalable. Chacun à sa manière d'exercer ce métier. Interrogée sur le sujet, Fatiha de Bir-Mourad-Raïs raconte qu'elle n'approuve guère les pratiques d'un raqi établi à Aïn Naâdja. Il ne reçoit pas les gens un par un, dit-elle, mais il regroupe une dizaine de personnes dans une même salle et se met ensuite à réciter quelques versets du coran. Cela, bien entendu, moyennant quelques pièces de monnaie. Le comble c'est qu'il oblige indirectement ses clients d'acheter dans l'un de ses magasins sis à quelques mètres de son domicile une longue liste de produits, tels le miel, l'huile d'olive… Puis il les somme de le revisiter quant à l'usage de ces traitements. «Ça coûte les yeux de la tête, et le résultat n'est pas assuré», affirme la dame… les raisons qui poussent les gens à tenter cette pratique sont nombreuses. Razika, qui n'a pas eu d'enfants après 15 ans de mariage, affirme qu'elle est prête à tout, à utiliser n'importe quel moyen pour avoir le bonheur d'être mère. «Pourquoi pas si Dieu le veut», murmure-t-elle. «Et si la baraka de si Ahmed de Larbaâ porte ses fruits», ajoute-t-elle. Hadjira, qui n'a pas eu son bac, nous raconte désespérément qu'elle a été orientée par ses voisines vers un raqi de Bachdjarrah qui jouissait d'une bonne réputation. «Malheureusement, c'est un pervers sexuel. J'ai frappé à sa porte, un jeune a ouvert en me souriant et m'a invitée à m'asseoir sur un banc installé face à une espèce d'armoire... Je n'ai pas besoin de vous faire un schéma, vous pouvez imaginer la suite. J'étais victime d'un monstre n'ayant aucune notion de la morale et qui a terni l'image de l'islam», témoigne-t-elle. Hakim, qui a aussi échoué au bac, affirme qu'il a été ensorcelé par sa voisine : «J'ai vu un raqi, mais je me suis rendu compte qu'il faisait sa roqia dans le sens de prédire l'avenir. A la fin, il m'a exigé indirectement d'acheter un micro pour son fils…». Rbiha, quant à elle, raconte qu'elle a laissé entrer une femme inconnue qui se disait capable de chasser les démons, et les mauvais sorts et de purifier sa maison. Les choses ont mal tourné puisque, en l'espace d'une demi-heure, la femme a pu lui voler tous ses bijoux en or et a disparu.