Lors de la reprise de l'audience après une première suspension, Malika Matoub a réagi à la lecture de l'arrêt de renvoi en hurlant qu'il ne fallait pas citer le nom de son frère. «Pour moi, dans l'affaire de mon frère, ces deux là (les accusés) n'ont rien à voir (...) Trouvez d'autres chefs d'accusations pour les deux accusés mais ne citez pas l'assassinat de mon frère», a déclaré Malika Matoub, invitée à s'expliquer par le juge. Le juge a souligné que la loi exigeait que l'arrêt de renvoi soit lu en entier, et que le procès aurait lieu quitte à faire évacuer la salle, avant de suspendre l'audience. Plus tôt, la partie civile s'était retirée du procès en faisant suspendre l'audience, mais le procès se poursuivait sur décision du juge. L'audience a été suspendue 30 minutes après le début des auditions quand la sœur du chanteur Malika Matoub et sa mère Aldjia Matoub ainsi que les membres de la fondation Matoub Lounès scandaient dans la salle d'audience «libérez Madjnoun et Chenoui, ramenez les vrais commanditaires». Malik Madjnoun et Abdelhakim Chenoui sont en prison depuis 13 ans, accusés d'avoir participé à l'attentat contre le chantre de la culture kabyle perpétré par un groupe de dix personnes, dont huit sont en fuite ou ont été tuées par les forces de sécurité. Chenoui a été évacué de la salle parce qu'il avait commencé à crier «je suis innocent». Malika Matoub s'est adressée à son tour à la salle: «celui qui est mort c'est mon frère, ce n'est pas un chien. Libérez Medjnoun et Chenoui. Je demande la comparution de Hassan Hattab». Hassan Hattab, ex-chef du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) avait revendiqué l'assassinat de Lounès Matoub en mai 1999 et s'était rendu en octobre 2007 aux autorités qui l'ont placé depuis en «lieu sûr». Aldjia Matoub a proclamé durant l'audience «je n'abandonnerai jamais les poursuites. Je ne pardonnerai jamais jusqu'à ma mort. Ceux qui l'on fait sont des fils de la région de Béni Douala (village près de Tizi Ouzou), il faut les ramener». L'un des avocats des accusés, Me Amine Sidhoum, a déclaré lors de l'audience «je compatis avec la famille Matoub et je demande que le procès soit tenu malgré le retrait de la partie civile parce que deux innocents sont en prison depuis 13 ans et qu'ils ont droit à un jugement». Et «13 ans en prison sans jugement est une honte pour la justice algérienne», a-t-il ajouté. Ali Medjnoun, le père de Malik Medjnoun, a clamé que son fils était «innocent. Nous sommes voisins avec la famille Matoub. Ils veulent que l'on devienne des ennemis. Mon fils a été détenu sept mois et demi en secret». Le procureur général a affirmé que "la non constitution de la partie civile n'a aucun lien avec la plainte publique. Le dossier est arrivé sur le bureau du procureur en juin 2011 et le bureau du procureur n'a rien à voir avec le retard dans l'instruction du dossier. Il rappelle que ce retard est lié aux demandes d'enquêtes complémentaires de la partie civile. Selon le code de procédure pénale, le procès peut avoir lieu avec ou sans la participation de la partie civile. Lounès Matoub, chanteur porte-drapeau de la culture et de l'identité berbères, a été assassiné à 42 ans, le 25 juin 1998, par un groupe armé islamiste au lieu-dit Tala Bouinane, à 5 km de Tizi Ouzou.