«Tant que l'embargo (sur le pétrole et le gaz) n'est pas levé, nous ne pouvons pas signer de contrat», expliquait le patron de Total, Christophe de Margerie, au Forum de Davos. En attendant cette levée, qui interviendra au mieux dans six mois si un accord définitif sur le nucléaire est signé, Total dépêche quand même un représentant dans la délégation du Medef à Téhéran. «Ce déplacement en Iran est une étape importante, souligne Olivier Appert, le président de l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (Ifpen), qui sera représenté. Il s'agit de poser des jalons avant que le secteur du pétrole et du gaz s'ouvre de nouveau.» Car pour tous les acteurs pétroliers, l'Iran est une région incontournable: le pays détient 9,1% des réserves mondiales d'or noir et 16% des réserves gazières (gaz de schiste exclu). La production pétrolière de l'Iran, qui dépassait 4 millions de barils par jour (Mb/j) en 2008 (selon l'Agence internationale de l'énergie, AIE) a chuté à 2,6 Mb/j en 2013 à cause des sanctions internationales. De l'avis de nombreux observateurs, l'industrie pétrolière est aujourd'hui en mauvais état, manque de pièces détachées et d'investissements. Aussi, à Davos, le nouveau président iranien, Rohani, a-t-il ouvert les bras aux compagnies étrangères. Son ministre du Pétrole a même «nommément cité les majors européennes, et les américaines Exxon et Conoco», relève Francis Perrin, directeur de la revue Pétrole et gaz arabes. Dans ce jeu très concurrentiel, «les Américains disposent de ‘'faux nez'' par exemple via une implantation à Dubaï qui est une porte d'entrée du secteur pétrolier iranien», fait valoir un autre spécialiste, et les Chinois qui n'ont pas sanctionné les Iraniens «ont pris des positions». Mais le Français Total dispose d'atouts. «Total a par le passé mené quatre projets pétroliers avec les Iraniens. En 1995, la compagnie avait bravé des menaces de sanctions américaines, les Iraniens s'en souviennent», raconte Francis Perrin. Bien que dépourvu d'actifs en Iran, Total «a su y préserver ses relations». Reste qu'avant de signer des contrats de production, il faut en connaître les conditions. Jusqu'à présent, les contrats iraniens étaient peu favorables aux entreprises étrangères. «L'Iran veut développer de nouvelles mesures contractuelles, plus attirantes, soulignait Christophe de Margerie à Davos, donc il faut voir de quoi il s'agit». De son côté, le géant pétrolier russe Lukoil a entamé des négociations avec son homologue iranien Nioc (National iranian oil company) sur l'exploration des champs de pétrole et de gaz en mer Caspienne, a rapporté samedi Press TV. Lukoil a exprimé sa volonté de retourner vers le marché énergétique iranien suite à l'assouplissement des sanctions contre ce pays, a déclaré l'ambassadeur russe à Téhéran, Levan Dzhagaryan. Lukoil avait dû se retirer du projet d'exploration pétrolière dans le bloc Anaran, dans le nord de l'Iran, en raison des sanctions imposées par les Etats-Unis et l'Union européenne sur le secteur énergétique iranien. Depuis l'investiture du nouveau gouvernement, le ministère iranien du Pétrole a concentré ses efforts sur le retour du pays sur les marchés énergétiques internationaux. En décembre dernier, le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namdar Zanganeh, a affirmé que le ministère avait préparé une feuille de route pour les investissements dans les industries du pétrole et du gaz pour les huit prochaines années, dans l'espoir d'attirer des placements d'un montant de 70 milliards de dollars américains. R. E/agences