«Ce texte est une véritable catastrophe. Il est en régression totale et nous renvoie cinquante ans en arrière. Celui proposé en 2001 par Ahmed Ouyahia, alors ministre de la Justice, était plus libéral.» Ces propos sont de Me Bentoumi, membre du bureau du conseil de l'Ordre d'Alger. Un point de vue partagé par les robes noires réunies hier au siège de l'UGTA. «C'est une remise en cause totale des droits de la défense», ont déclaré les intervenants. Me Sellini, qui présidait la rencontre, n'a pas été avec le dos de la cuillère à l'encontre du département de Tayeb Belaïz. C'est la quatrième mouture, a-t-il expliqué à ses confrères non sans préciser qu'il a fait partie de la commission mixte. A chaque fois que nous arrachons des acquis ou amendons le texte, le ministère vient la séance suivante avec un nouveau texte. En dernier ressort, il a concocté celui-là, que nous avons rejeté. Les articles controversés sont liés aux mesures disciplinaires que pourrait prendre le magistrat lors de l'audience à l'encontre de l'avocat s'il venait, selon le texte, à perturber un procès dans lequel il plaide. Il est traduit devant le conseil de discipline sur demande du parquet. «Cela veut dire tout simplement que l'avocat sera bâillonné, sans possibilité de défendre son client», dira le bâtonnier d'Alger. D'autre part, l'accès à la profession d'avocat est soumis à des conditions draconiennes. En fait, les parents pauvres sont les avocats stagiaires qui ne pourront, par exemple, plaider devant une cour qu'après 13 ans d'exercice et devant la cour suprême qu'au bout de 23 ans. D'autre part, les avocats ont dénoncé l'ingérence de la chancellerie dans les affaires de la profession en la mettant sous sa tutelle. En effet, l'avant-projet dispose que toutes les délibérations du conseil de l'Ordre ou des assemblées générales doivent être soumises au ministère de la Justice qui a le pouvoir de les annuler. Pourtant, c'est une profession libérale et indépendante. D'autre part, le texte dispose que c'est le ministère qui crée les conseils de l'Ordre, «après consultation de l'Union des conseils de l'Ordre». Ce qui est inadmissible pour les robes noires. «C'est du jamais-vu, même du temps du parti unique», a indiqué un ancien bâtonnier. Pour sa part, Me Brahimi, très pragmatique et concret demande à l'assistance d'arrêter de philosopher et de prendre des décisions à même d'influer sur le cours des événements. Il proposera ainsi de rédiger un communiqué pour rejeter dans la forme et dans le fond l'avant-projet de loi, de saisir le président de la République pour qu'il intervienne sur cette question et enfin d'élaborer une motion de renouvellement de confiance à Me Sellini pour la préparation des prochaines élections. F. A.