De notre envoyé spécial à Doha Abdelkrim Ghezali Après le sommet de Damas, qui intervint à la suite de la guerre menée par Israël contre le Liban alors que le différend syro-libanais avait divisé les Arabes, le sommet de Doha vient confirmer l'atomisation des Etats arabes face aux différents défis qui leur font face. L'Egypte, l'Arabie saoudite, la Tunisie et le Maroc s'opposent fermement au sommet extraordinaire de Doha pour les mêmes raisons qui les ont empêchés de participer au sommet de Damas. On s'en souvient, l'Arabie saoudite, l'Egypte et la Jordanie accusaient la Syrie de soutenir le Hezbollah qui aurait provoqué une guerre avec Israël, faisant du coup du parti islamiste libanais, qui représente pourtant la résistance à l'occupation et aux agressions israéliennes, le coupable. Aujourd'hui, c'est Hamas qui devient la bête noire des mêmes pays qui veulent non seulement dicter aux Palestiniens la voie à suivre mais semblent parier sur l'agression israélienne pour «anéantir» Hamas que ces pays opposent à Abbas et à l'Autorité palestinienne. Ce qui explique les manœuvres de l'Egypte et son plan d'action aussi inutile que sournois dans la mesure où il fait, tout comme Israël d'ailleurs, de la question du passage de Rafah le problème principal entre Palestiniens et Israéliens, faisant ainsi fi de l'occupation, du blocus de 18 mois et du blocage des négociations palestino-israéliennes. Les arguments avancés notamment par l'Egypte pour torpiller le sommet de Doha ne reposent sur aucun argument politique sérieux. Abou El Ghith, ministre égyptien des Affaires étrangères, estime que si «nous allons à Doha, le sommet du Koweït n'aurait aucune raison d'être», proposant de discuter informellement de l'agression contre Ghaza le 19 janvier prochain au Koweït. En quoi le sommet de Doha menace-t-il celui prévu depuis une année au Koweït ? D'une part, le sommet de Doha est extraordinaire, motivé par un événement exceptionnel qu'est une guerre barbare contre les Palestiniens de Ghaza. En second lieu, même le sommet extraordinaire de Doha est tardif par rapport à l'urgence qu'est la situation à Ghaza. En troisième lieu, le fait de tenir un sommet à part exclusivement pour Ghaza et la Palestine vise à ne pas parasiter l'ordre du jour du sommet de Koweït City, en l'occurrence la coopération économique arabe qui est un objectif stratégique de nature à permettre aux Arabes d'unir leurs potentiels financiers et économiques pour justement devenir une force politique qui a son poids afin de mieux peser sur la scène internationale. Malheureusement, les Arabes sont manifestement incapables d'avoir une vision géopolitique et géostratégique commune, avec comme ligne de mire leurs seuls intérêts et non ceux des puissances qui les pilotent. Aujourd'hui, certains arabes deviennent forts en calcul mental pour torpiller un sommet qui a une symbolique politique importante.