Anciens combattants, leaders communistes et diplomates se sont rassemblés hier, dans la ville de Dien Bien Phu, pour célébrer le 60e anniversaire de la victoire historique vietnamienne sur les troupes coloniales françaises. Après 56 jours de combats sanglants, la bataille dans cette cuvette de Dien Bien Phu prend fin le 7 mai 1954 par la chute du camp retranché français, qui scelle la fin de la présence française en Indochine et l'émergence du Vietnam en tant que nation indépendante. «Dien Bien Phu a été une étape marquante, éclatante, dans l'Histoire de la nation vietnamienne», soulignera le président Truong Tan Sang lors d'une cérémonie remarquée. «C'est une victoire qui a aidé à mettre fin au colonialisme et a amené le Vietnam à son indépendance», dira, de son côté, le ministre de la Défense Phung Quang Thanh après avoir visité le plus grand cimetière de combattants vietnamiens tombés lors de la bataille. Mais les accords de Genève, le 2 juillet 1954, qui marquent la fin de la guerre d'Indochine, entérinent aussi la division du Vietnam entre le Nord communiste et le Sud pro-américain. Le pays ne sera finalement réunifié qu'après la chute de Saïgon le 30 avril 1975 qui consacre la victoire du Nord, malgré l'intervention militaire des américains dans cette guerre du Vietnam qui causera le massacre de plus de trois millions de civils vietnamiens. Sans Dien Bien Phu, la réunification n'aurait pas eu lieu, dira Vu Nam Hai, directeur du musée consacré à la bataille. «Dien Bien Phu était une victoire vraiment spéciale.» Une victoire possible notamment grâce au génie militaire du général Vo Nguyen Giap, décédé l'an dernier à l'âge de 102 ans. En ce printemps 1954, au rythme d'un déluge d'obus et de combats au corps à corps, les soldats des deux camps tombent et leurs dépouilles pourrissent sur les collines. «C'était très dur, très difficile. Nous devions trouver où l'ennemi était pour prendre chaque position (...) Quand les Français parachutaient du ravitaillement, nous devions le trouver en premier», raconte Hoang Trong Binh, 83 ans, ancien combattant en grand uniforme. La bataille fera quelque 10 000 morts côté vietnamien, et 3 000 morts ou disparus parmi les soldats français. Le 7 mai, le commandement français et 10 000 soldats sont même faits prisonniers. L'un des sites clé de la bataille, Eliane (plusieurs positions stratégiques avaient des noms de femmes), était plein de visiteurs à la veille des cérémonies anniversaire, grimpant sur des chars français en train de rouiller ou explorant les tranchées. «En seulement un mois, nous avions creusé quelque 400 kilomètres de tranchées autour de Dien Bien Phu, cela a été une clé de notre victoire», expliquera l'ancien combattant Ngyuen The Tran, 81 ans, venu rendre hommage à ses camarades tombés au combat. «J'espère qu'ils reposeront en paix à jamais. Ils sont morts mais je suis toujours là pour me souvenir d'eux», ajoutera-t-il, se disant «heureux» que ce champ de bataille soit aujourd'hui une jolie petite ville. R. I./Agences