Sans être nouveau, un débat passionnant agite en ce moment la classe politique, l'opinion et la presse françaises. Ce n'est pas un sujet facile de savoir comment un banlieusard paumé, élevé et vivant à la marge dans le statut de l'infra en tout, peut se transformer en tueur froid d'individus pacifiques qui n'ont d'autre malheur que celui de croiser son chemin, par le simple fait du hasard. Le cobaye de l'heure ressemble à s'y méprendre à un certain Mohamed Merah, un «illuminati» mi-islamiste mi-gangster qui avait fait un carnage en 2012 en assassinant sept personnes entre juifs, musulmans et chrétiens, dans le sud de la France. Ce nouveau cas d'école, comme le précédent, vient de défrayer tragiquement la chronique. Il s'appelle Mehdi Nemmouche, est âgé de 29 ans et a fait le coup de feu en Syrie pendant un an en 2013. Un «stage» idéologique et de maniement des armes chez les pires frères qui soient. Auprès de Eeil, quatre lettres qui glacent et sèment l'effroi à leur énoncé : Etat islamique en Irak et au Levant, une organisation terroriste tristement connue pour sa barbarie comparable à celle du GIA en Algérie dans les années 90. Puis arrive, le 24 mai, l'épreuve du feu contre les innocents : le revenant de Syrie assassine à bout portant et froidement quatre personnes au Musée juif de Bruxelles. Une épreuve comme une autre du Djihad dans la voie de Dieu. Mohamed Merah a grandi dans un bâtiment HLM qui ressemble à une barre chocolatée renversée plantée dans une cité de la «Ville rose» (Toulouse). Son émule posthume s'est éveillé à la vie dans la grisaille des Corons et des mines de charbon fermées du Nord, entre Tourcoing, Roubaix et Lille. Happé tôt par le banditisme et les casses commis arme en main, il devient familier des prisons. Prison ? Oui, prison, geôle, trou, cachot, taule...Et comme par magie, dès que le mot a été prononcé, une clameur s'est élevée très haut dans le ciel de l'Hexagone et même au-delà, se propageant comme le nuage de Tchernobyl : Mehdi Nemmouche a été embrigadé et radicalisé par les islamistes, en prison. La parade est aussitôt trouvée par le gouvernement français. Elle n'est pas nouvelle et son efficacité reste à démontrer : on envoie des imams et des aumôniers musulmans dans les prisons pour détruire le travail d'endoctrinement des djihadistes. Quelle rapidité ! La cause sitôt détectée, un remède lui est trouvé. Il suffisait d'y penser. C'est incroyable, à la fin, combien d'assassinats d'innocents, juifs, arabes ou chrétiens, faudra-t-il sur le sol français, pour comprendre que le pire des discours d'endoctrinement est celui des porte-voix les plus autorisés de l'Etat français lui-même ? En 2012, le chef de la diplomatie française, amplifiant le discours belliqueux officiel de son pays, déclarait sans surprendre son gouvernement ni la presse : «Bachar al-Assad ne mériterait pas de vivre sur cette terre.» Depuis quand un ministre des Affaires étrangères s'autorise-t-il à désigner aux assassins leurs victimes ? Cette déclaration de Fabius, et d'autres encore du même acabit, ont indiqué la voie pour des jeunes paumés des banlieues : ce sera le chemin de Damas, via la Turquie. Aujourd'hui, les autorités françaises s'alarment du chiffre de 750 de leurs ressortissants entre ceux activant auprès des pires groupes sanguinaires en territoire syrien et ceux susceptibles de les rejoindre. À vrai dire, c'est toute l'orientation de sa politique extérieure, imposée par des lobbys précis et connus, qui est en train de placer la France dans l'œil du cyclone islamiste, l'islamisme qui frappe et tue. A. S.