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Pour l'unité des rangs palestiniens et arabes Discours de Abdelaziz Bouteflika, à la séance consacrée à Ghaza lors du sommet économique et social à Koweït
«Majestés, Altesses, Messieurs les chefs d'Etat et de gouvernement, Excellences, Mesdames et Messieurs, Nous voilà de nouveau réunis dans l'urgence que nous impose la situation dramatique qu'endurent nos frères palestiniens à Ghaza du fait de l'agression israélienne. En ce moment même, cette agression barbare contre le peuple palestinien n'a pas tout à fait cessé. Le nombre de martyrs augmente et des centaines de vies humaines et des dizaines d'enfants, de femmes et de vieillards ont été sacrifiés sur l'autel de desseins inavoués sous les yeux d'un monde médusé et d'instances internationales paralysées. Ceci jette un sérieux discrédit sur les fondements de la légalité internationale, sur la validité des principes démocratiques déviés par l'oppression avec le cortège de violations du droit et la négation des valeurs humaines mais aussi sur la crédibilité de la communauté des nations elles-mêmes. En relevant le défi de la résistance à l'une des agressions les plus sanglantes et les plus meurtrières de notre temps, le peuple palestinien a été de nouveau au rendez-vous de l'histoire. Sa vaillante résistance et sa dignité lui ont valu, partout à travers le monde, l'admiration, la considération et l'estime de larges franges de l'opinion publique internationale et de tous ceux qui défendent les valeurs de justice et les idéaux de paix à travers le monde. Nous tenons à rendre un vibrant hommage à ce peuple frère qui est en train d'écrire, par le sang, l'une des pages les plus glorieuses de son histoire. Nous tenons à nous recueillir avec humilité à la mémoire de tous ceux qui ont honoré leur engagement à l'égard de leur cause et de leur patrie et nous nous inclinons devant leur martyre. Le peuple algérien, qui a connu les affres de la guerre coloniale et consenti de lourds sacrifices pour le recouvrement de sa liberté et de son indépendance, comprend les souffrances de la population de Ghaza. Il s'identifie pleinement à son combat et partage ses épreuves. Fort des enseignements de sa propre histoire, le peuple algérien, dans un élan spontané de soutien et de solidarité, a massivement empli les rues de toutes les villes d'Algérie pour exprimer, par-delà la révolte, la colère et l'indignation, sa conviction que les sacrifices, quels que soient leur ampleur et le poids des souffrances qu'elles génèrent, ne sont jamais vains et que la cause d'un peuple n'est jamais perdue, en dépit de toutes les vicissitudes et de tous les aléas. C'est cette conviction profonde, au demeurant ancrée dans le subconscient collectif arabe, qui doit inspirer nos travaux et notre action commune, surtout en ces temps où le monde arabe est rongé par le doute et l'incertitude et menacé par le péril du sentiment d'impuissance et les risques du renoncement. Les lourds sacrifices que consent, jour après jour, le peuple de Ghaza, exigent de nous, non seulement une solidarité, somme toute naturelle, mais aussi et surtout un engagement renouvelé et un soutien indéfectible, afin que des réponses concrètes puissent être apportées à l'impérieuse nécessité d'assurer la protection du peuple palestinien en obtenant la cessation de cette agression, le retrait des troupes d'occupation et la levée de l'inique blocus qui asphyxie la population de Ghaza. Nous devons œuvrer à la recherche d'une solution urgente aux divergences qui minent l'unité et la cohésion des Palestiniens. Le dialogue et la réconciliation nationale restent, à nos yeux, les garants du recouvrement de l'unité et les gages de la victoire. Nos frères, qui assument la direction de la révolution palestinienne, ont la lourde responsabilité de reconstruire l'unité nationale autour d'une stratégie commune devant garantir leurs droits légitimes et la création d'un Etat palestinien indépendant et viable avec El Qods comme capitale. Nous devons les accompagner dans ce processus décisif, de même que nous devons, pour notre part, réaffirmer la validité de notre engagement, ferme et sans équivoque, à l'égard de la cause palestinienne qui doit retrouver la place centrale en tant que cause fondamentale autour de laquelle se fait le consensus arabe. Ce consensus existe. L'occupation des territoires arabes et leur annexion, depuis 1967, par la violence et au mépris du droit international, a été et reste la cause première de la violence dans la région. Cette violence ne prendra fin qu'avec la fin de l'occupation et le rétablissement des droits nationaux du peuple palestinien. Ce constat est également objet de consensus et doit être rappelé avec force et sans équivoque. En effet, sous les insidieux prétextes d'autodéfense et de légitime défense, Israël a perpétré, sous le regard d'un monde perplexe, l'un des massacres les plus horribles et les plus répugnants. Or de quelle autodéfense peut-il s'agir quand il y a une asymétrie des forces aussi écrasante et quand une partie, qui dispose d'un monopole complet sur l'usage de la force, mène une «guerre totale» contre une société sans défense, qui manque de toute capacité défensive militaire et qui est totalement démunie face aux attaques israéliennes. Il reste que, face à la vérité infalsifiable des images, le monde a aujourd'hui compris que la prétendue légitime défense et l'exigence de sécurité ne sont, en réalité, que faux prétextes visant à masquer un système qui n'a rien à envier à un apartheid de triste mémoire et à justifier de véritables desseins génocidaires. Les images insoutenables qui nous sont parvenues, jour après jour, de Ghaza, ont, par leur brutalité et leur barbarie, bouleversé le monde et secoué les consciences. Cela doit changer. La communauté internationale ne doit pas continuer à tolérer cette impunité. La force doit revenir au droit. Le monde arabe est en droit d'exiger que le rejet mondial de la barbarie puisse se traduire par des décisions contraignantes du Conseil de sécurité à l'égard d'Israël. Les Nations unies doivent mettre en œuvre la norme reconnue de la responsabilité de protéger une population civile qui est punie collectivement par une agression qui s'apparente à un crime contre l'humanité. En tout état de cause, ce qui s'est passé à Ghaza n'est autre qu'un crime de guerre qui ne saurait rester impuni. Il exige de la communauté internationale un engagement solidaire et renouvelé pour le droit international, de même qu'il exige de remettre le droit au centre du débat. Car, ce qui est en jeu ici, ce n'est pas seulement le sort des Palestiniens, mais le devenir du système de sécurité collective dont s'est dotée la communauté internationale pour se prémunir contre les périls d'un monde où le droit s'efface pour céder le pas à la force. Ce droit international, que d'aucuns ne cessent d'invoquer s'agissant de certaines situations de crise dans le monde, semble curieusement s'arrêter aux frontières d'Israël. En faisant avaliser cette politique de la brutalité, du fait accompli, du déni du droit, Israël expose ses alliés et expose le monde au pire des scénarios. A force de traiter les Palestiniens par le mépris et l'humiliation, à force de vouloir systématiquement les affaiblir et les diviser pour leur extorquer concession sur concession, à force de les martyriser et de les terroriser, à force de les confiner dans des ghettos, Israël court le risque de mener, à terme, la région dans une situation explosive et ingérable. Cette politique et les dépassements gravissimes qui en découlent vont alimenter les frustrations et les ressentiments dans le monde, notamment chez les peuples arabes et musulmans, auprès desquels le sentiment compréhensible de révolte et d'indignation ne peut que générer de l'hostilité, voire de la haine, source de toutes les violences. Cette tendance contrarie les efforts colossaux consentis pour faire prévaloir la paix et la réconciliation et réduire l'extrémisme et la violence. Par ailleurs, l'opération de disqualification systématique de la communauté internationale et de délégitimation de ses efforts qui ont concouru à la recherche d'une solution durable au conflit a eu pour conséquence de jeter le désarroi chez les populations arabes qui constatent que le seul progrès réel sur le terrain est celui de la confiscation des terres, de l'arrachage des oliviers et de la destruction des maisons pour mieux assurer l'élargissement des colonies. Nous tous et ceux à travers le monde qui, de bonne foi, ont investi de gros efforts et misé sur la recherche d'une formule conduisant à une solution globale, juste et durable du conflit du Moyen-Orient, se sont rendu compte, hélas, que toutes ces opérations n'avaient pour autre objectif que de détourner l'attention de l'opinion, tandis qu'Israël construit de nouvelles colonies de peuplement, modifie la démographie de Jérusalem et, plus généralement, crée, par la force et le sang, de nouveaux faits accomplis sur le terrain. Un autre aspect de la problématique engendrée par cette politique agressive et irresponsable est lié au rôle du Conseil de sécurité qui, au regard de la Charte des Nations unies, a la responsabilité première en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales et qui est donc supposé prendre les mesures nécessaires pour ramener la paix internationale en cas de rupture de celle-ci. Or, le Conseil de sécurité a, de nouveau, donné la preuve de son incapacité. Sinon comment peut-on raisonnablement comprendre que, face à une agression caractérisée de l'ampleur de celle commise à Ghaza, celui-ci s'est montré complètement désarmé. Si ces violations graves des normes impératives du droit international et si les crimes internationaux commis par les autorités israéliennes restent impunis, c'est tout le système de protection des droits humains qui sera discrédité et détruit. Il est d'une urgence absolue d'acheminer vers Ghaza l'aide humanitaire si abondante, en termes d'intentions, mais qui ne parvient qu'insuffisamment aux Ghazaouis du fait des restrictions draconiennes imposées par les forces de l'occupation au niveau des points de passage dont l'ouverture revêt une importance vitale. Pour assurer l'efficacité et le succès de ces opérations d'urgence, il est indispensable que les autorités palestiniennes s'organisent de manière efficiente pour accueillir ces aides. Par-delà cette aide d'urgence, il nous faudra d'ores et déjà nous inscrire dans la perspective d'une aide à la reconstruction et au développement. Dès lors, il nous revient d'aider les Palestiniens à élaborer un plan de reconstruction de ce territoire martyr et de participer à son financement. Mais là également, pour que cette aide internationale devienne réalité, il faut que le peuple palestinien rétablisse l'unité de ses rangs à travers une véritable et durable réconciliation nationale. Ce n'est qu'à cette condition que le peuple palestinien sera en mesure de relever tous les défis qui se posent à lui, non seulement pour affronter l'ennemi mais également pour imposer une paix juste et digne qui lui permette de mobiliser ses énergies au service du progrès et du développement de l'ensemble du peuple palestinien. La tragédie de Ghaza continuera de peser lourdement sur les acteurs de la question palestinienne. Il ne fait pas de doute que la mise en place des conditions du règlement de ce conflit et le traitement de ses conséquences sur les populations de Ghaza requièrent notre mobilisation totale, celle de la communauté internationale, et l'intérêt soutenu de celle-ci en faveur d'un règlement définitif de la question palestinienne. L'année 2009 pourrait, plaise à Dieu, être marquée par une évolution qualitative de la prise en charge du conflit israélo-arabe. La communauté arabe souffre de la division de ses rangs. Cet affaiblissement est exploité par nos ennemis et nos adversaires. Il est de notre devoir politique et moral d'assumer nos responsabilités pour mettre rapidement un terme à cette situation qui ne doit pas détourner nos frères palestiniens de la mission historique qui est la leur, à savoir la libération de la Palestine.