Les Libyens réoccupent de plus en plus la rue pour manifester leur colère contre les milices et les groupes islamistes qui ont semé le chaos dans le pays depuis la chute de l'ancien régime de Mouammar al-Kadhafi fin 2011. Deux semaines après la manifestation de plus d'un millier de personnes à Benghazi, dans l'est de la Libye, plusieurs villes libyennes ont connu vendredi et hier une nouvelle vague de colère populaire, mais aussi de soutien au nouveau Parlement qui se cherche de sérieux appuis politiques aussi d'une population exaspérée par le chaos politique et sécuritaire. Excepté la capitale Tripoli où des hommes armés ont tiré sur les manifestants hier, les autres manifestations (marches et rassemblements) se sont déroulées sans incidents. Tirant les leçons de l'intervention militaire occidentale, menée par l'Otan, pour chasser l'ancien régime de Tripoli, les Libyens ont réitéré leur désir d'un règlement de cette guerre civile par la mise en place d'un véritable processus politique. Même s'ils dénoncent le déroulement des sessions parlementaires à Tobrouk (Est), qu'ils considèrent comme anticonstitutionnelle et violant la loi, ils sont toutefois d'accord pour un soutien à leurs députés pour sortir la Libye de cette impasse. C'était le cas hier dans certains quartiers de Tripoli et dans les villes de Misrata et de Zenten, où les manifestants ont scandé des slogans hostiles à toute intervention étrangère, dénonçant aussi l'islam politique que le Premier ministre de transition, Abdallah al-Thouni, accuse d'avoir mené la Libye vers l'échec, en raison de sa défaite aux législatives du 25 juin dernier. Le courant islamiste a été mis en minorité, lors de ce scrutin, ce qui a jeté sur lui les soupçons du courant nationaliste et libéral qui l'a mis ouvertement en cause dans la dégradation de la situation sécuritaire en Libye depuis mai dernier. Vendredi, une marche populaire, suivie d'un rassemblement à la place des Martyrs à Tripoli, a été organisée en soutien au Parlement libyen, a rapporté la presse locale en ligne. Les manifestants ont revendiqué la légitimité de cette Assemblée nationale, la seule, selon eux, à mener le processus de reconstruction du pays. Ils n'ont pas manqué aussi d'afficher leur soutien à «la construction d'une véritable armée et d'une police forte», a rapporté Akhbar Libya, portail d'information libyen. Autre signe de la volonté populaire à sortir ce riche pays pétrolier, livré par l'Otan aux milices et terroristes de Ansar al-Charia, la mobilisation de certains chefs tribaux pour réaliser la réconciliation entre plusieurs tribus rivales à Rafla, a indiqué Al-Rasseefa al-Ikhbariya, un quotidien en ligne local. Ces tribus ont sollicité la médiation de la commission des Affaires étrangères, au sein du Parlement, pour opérer un premier rapprochement et discuter de leur accord de réconciliation, a ajouté la même source. Parmi les questions inscrites à l'ordre du jour, la conclusion d'un accord de cessez-le-feu immédiat, condition préalable au règlement définitif de la crise. La restitution des bases militaires occupées par les miliciens proches des tribus en conflits, la libération des prisonniers de guerre, la sécurisation des principaux axes routiers et la mise en place d'une commission spéciale pour juger les auteurs des exactions, sont aussi inscrits dans la feuille de route de la signature de l'accord de réconciliation auquel les pays voisins ont appelé. Pour rappel, l'ancien président du Conseil national de transition, Mustapha Abdeldjalil, a averti contre les risques de la scission de la Libye, rejetant lui aussi toute ingérence militaire étrangère dans ce pays, en proie à des violences meurtrières qui se sont accentuées ces trois derniers mois, particulièrement à Tripoli et à Benghazi. Les pays voisins de la Libye ont affiché leur volonté d'assister les autorités de transition, ainsi que la nouvelle Assemblée, dans le processus de sortie de crise, rejetant toute idée d'une intervention armée, comme l'a rappelé l'Algérie et l'Egypte, il y a moins d'une semaine. Mais en attendant un règlement politique de la crise, les affrontements se poursuivent à Tripoli et à Benghazi, entre les milices et les groupes islamistes, obligeant de nombreux pays à fermer leurs ambassades et à évacuer leurs ressortissants. L. M.