Ali Zeidan, le Premier ministre, demande aux Libyens de lui accorder un « mandat » clair pour mettre fin à la recrudescence des assassinats et des violences, notamment à Benghazi. Cette mesure couplée avec un remaniement gouvernement « dans l'urgence », permettront-ils à la Libye de s'éloigner du chaos dans lequel elle menace de sombrer comme la Tunisie et l'Egypte, deux ans après le « Printemps arabe » ? Le Premier ministre proposera ce soir au plus tard un nouveau cabinet au Congrès général national (CGN), la plus haute autorité politique et législative du pays. Les portefeuilles concernés ? Zeidan qui a affirmé qu'une « personnalité » a été choisie pour le ministère de la Défense, un poste vacant depuis la démission fin juin de Mohamed al-Barghathi, n'a donné aucune autre précision. Peinant à rétablir l'ordre et à former une police et une armée professionnelles, il annonce un recours à des équipes d'enquêteurs britanniques et d'Interpol pour l'aider à identifier les responsables des dernières attaques et surtout la réactivation des « controversés » services de renseignement intérieur. « Je comprends l'opposition de la population à cet organe qui a été utilisé par l'ancien régime pour réprimer le peuple. Mais sans un organe de renseignement efficace, nous ne pouvons pas empêcher les attaques », dit-il dans un point de presse, où il a accusé publiquement le CGN d'entraver son travail. « Je suis indépendant. Je ne suis soutenu par aucun parti », dit-il s'adressant aux Libyens dont il attend un « mandat » pour agir contre les « milices » qui refusent de désarmer et les « nostalgiques » de l'ex-régime. Les manifestations de rue de milliers de Libyens criant leur colère contre les autorités de transition et les partis politiques, au lendemain d'une série d'assassinats, ayant visé notamment un militant anti-islamiste, Abdessalem al-Mesmari, seraient-elles une réponse à cette demande de « mandat » ? Que ce soit à Benghazi ou Tripoli, les manifestants se sont pris aux locaux des partis politiques, en particulier le Parti pour la justice et la construction (PJC), bras politique des Frères musulmans. Lundi soir, ils sont saccagé un local du parti Al-Watan de l'ex-chef militaire de Tripoli, Abdelhakim Belhaj, et incendié une partie du bâtiment, situé dans un quartier résidentiel à Tripoli. « Perturber le processus démocratique ou le suspendre n'est dans l'intérêt de personne. Parce que l'unique alternative sera la violence et le chaos », déclare Nouri Abousahmein, le président du CGN, dans un appel aux Libyens leur demandant d'appuyer le processus démocratique. Comme première mesure, l'institution qu'il préside a nommé lundi soir, le colonel-major Abdessalem Jadallah al-Salihine, 53ans, un ancien officier des forces spéciales de Kadhafi qui a rejoint la rébellion en 2011, comme chef d'état-major de l'armée en « construction ». L'ex-commandant des forces rebelles sur le front de Bréga, à l'est du pays, dont il est originaire, remplacera le général Youssef al-Mangouch qui a démissionné le 9 juin dernier sur fond d'une escalade des violences à Benghazi et d'accusation de collusion avec les milices composées d'anciens rebelles. Deux ans après la « révolution », les Libyens découvrent que les rivalités entre les partis politiques qui manipulent des milices empêchent la stabilisation du pays où pullulent les armes.