Impressionnant. Un président noir a investi ce 20 janvier l'imposant édifice de Washington, la Maison-Blanche. L'investiture de Barack Hussein Obama constitue un événement historique, le plus important de ce nouveau millénaire qui consacre l'accession d'un Noir à la magistrature suprême de la première puissance du monde. Lundi, l'Amérique était aux pieds d'un homme dont la race y a longtemps souffert de l'esclavage, ce long et douloureux périple retracé par un des descendants, Alex Halley, dans son roman intitulé Roots. Elle était enfin devenue la patrie de Rosa Parks, cette femme qui, le 1er décembre 1955, dans un bus de Montgomery en Alabama, a refusé de se lever et de céder sa place à un Blanc. Même si la pionnière de la lutte pour les droits civiques des Noirs aux Etats-Unis a, par la suite, eu droit à la reconnaissance non seulement des siens mais aussi de tout le pays -sa dépouille a été exposée dans la rotonde du Capitole à sa mort en octobre 2005 et les drapeaux américains ont été abaissés sur ordre du Président de l'époque-, elle était enfin devenue la patrie de Martin Luther King, ce pasteur noir militant pacifiste contre la discrimination raciale. «I have a dream», avait-il clamé à Washington DC (!) le 28 août 1963, sur les marches du Lincoln Memorial, lors de la marche vers Washington pour le travail et la liberté. Son rêve a fait son chemin pour se réaliser 45 ans plus tard grâce à l'ambition d'un autre Afro-Américain. Une longue marche symbolisée par le parcours qu'a tenu à faire à pied le président Obama en descendant de la limousine qui le menait vers la Maison-Blanche. On ne pouvait le voir faisant ce parcours, aller résolument vers l'accomplissement de son objectif, sans penser à ces femmes et à ces hommes asservis sous le joug des Blancs, qu'Abraham Lincoln a tenu à affranchir au prix de sa vie. Le 16ème président des Etats-Unis avait en quelque sorte balisé le chemin pour son 44ème successeur parvenu à l'investiture suprême près d'un siècle et demi plus tard en abolissant l'esclavage en 1862. L'arrivée d'Obama à la tête d'un pays devenu le sien ne peut que signifier que celui à qui il voue une admiration sans bornes n'est pas mort en vain. Que ceux qui ont commandité son assassinat n'ont pas pu stopper la marche des Afro-Américains vers leur destin. En foulant le sol de la Maison-Blanche, Obama a réalisé son propre rêve, mais il a aussi pris la revanche de Rosa Parks, de Martin Luther King et de tous les hommes et de toutes les femmes que l'Amérique avait foulés aux pieds. Des ancêtres d'Alex Halley et de Rosa Parks à Barack Obama, le chemin a été long et ardu. Un jour peut-être, les Amérindiens pourront eux aussi crier victoire. R. M.