Le plan opérationnel de cette mission, baptisée «EU Navfor Med» a été adopté, et les contributions en navires, moyens aériens et drones sont suffisantes, ont précisé d'autres sources. L'opération navale de lutte contre le trafic de migrants en Méditerranée va se limiter à une surveillance accrue des réseaux de passeurs en l'absence d'un feu vert des Nations unies. Elle va permettre de détruire les embarcations utilisées par les trafiquants au plus près des côtes libyennes, et notamment les «bateaux mères» qui servent à tracter en haute mer des radeaux de fortune chargés de migrants. «Il s'agira d'écouter, de voir, d'analyser» les activités des trafiquants grâce à l'utilisation de navires militaires, d'avions patrouilleurs maritimes, de drones et de sous-marins. Par ailleurs, les 28 vont pouvoir partager les renseignements sur ces réseaux aujourd'hui détenus surtout par les pays en première ligne, Italie, Grèce et Malte. «Il ne faut pas s'imaginer toute une armada qui débarque», a précisé la première source diplomatique, estimant qu'il s'agit de préparer le terrain en attendant une résolution de l'ONU afin de «monter en puissance». Car la destruction des navires et autres avoirs des trafiquants «reste la raison d'être de cette mission, ce que les Etats membres visent», fait-il observer. Rappelons, que les dirigeants de l'UE ont tenu un sommet extraordinaire à Bruxelles après la mort de centaines de migrants en Méditerranée en avril dernier. C'est le chef du gouvernement italien Matteo Renzi qui avait réclamé la tenue de ce sommet européen en urgence, après le naufrage d'un chalutier chargé de 700 migrants. Ce qui a fait craindre une véritable hécatombe en Méditerranée. «On ne parle pas de choses banales, mais bien de vies humaines», avait déclaré le chef du gouvernement italien ajoutant que «si on ne parvient pas à régler le problème à la racine, on ne réussira jamais à le régler. Le trafic d'êtres humains est une plaie pour le continent européen. Le problème n'est pas celui du contrôle des mers, mais bien la mise hors d'état de nuire des passeurs, ces nouveaux esclavagistes». L'Espagne avait elle aussi réclamé un sommet extraordinaire. «L'Europe doit réagir à la tragédie de l'immigration. Je me joins à l'appel à la convocation d'un Conseil européen extraordinaire», avait indiqué le Premier ministre espagnol, Mariano Rajoy. Lors de la tenue du sommet européen, il a été décidé d'«entreprendre des efforts systématiques pour identifier, capturer et détruire les bateaux avant qu'ils ne soient utilisés par les trafiquants». De même et selon un document du sommet, la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini a été invitée «à commencer immédiatement les préparatifs pour une possible opération de sécurité et de défense à cet effet, en accord avec la loi internationale». L'organisation de cette opération militaire européenne serait une première dans la lutte contre l'immigration clandestine. «Sa mise en oeuvre prendra du temps», ont averti les diplomates chargés du dossier. «Il va falloir préparer des plans opérationnels, puis mobiliser des moyens militaires», a-t-on expliqué. Atalante, la mission militaire de l'UE contre la piraterie au large des côtes somaliennes, a été lancée en 2008, mais les premières actions contre les bateaux des pirates ont été menées en 2011-2012, a rappelé l'eurodéputé français Arnaud Danjean. «Pour détruire des embarcations en Libye, il faut un mandat juridique» des Nations unies, a-t-il souligné. «La possibilité d'action à terre donnée à la force navale Atalante en Somalie n'a presque jamais été utilisée, car ce n'est pas si simple», a-t-il expliqué. Le plan soumis aux dirigeants européens prévoit également des mesures pour intervenir durant la traversée des bateaux de migrants. Il propose de «doubler» de trois à six millions d'euros le budget mensuel alloué à Frontex, l'agence chargée de la surveillance des frontières, pour renforcer les moyens alloués aux missions maritimes Triton en Italie et Poséidon en Grèce, afin de leur permettre d'augmenter leurs opérations de surveillance et de sauvetage. Le troisième volet traite de l'accueil des migrants et des réfugiés. Il propose aux Etats d'accueillir «au moins 5 000 personnes ayant obtenu le statut de réfugiés», dans le cadre d'un projet de réinstallation. Les Etats de l'UE sont, par ailleurs, invités à montrer leur solidarité avec les pays les plus touchés en acceptant de prendre en charge une partie des arrivants, afin d'aider à déterminer s'ils peuvent bénéficier ou non du droit d'asile. H.Y.