Au moins 86 personnes ont été tuées hier lors d'une double explosion dans la capitale turque Ankara. L'attentat est survenu alors que des militants de l'opposition participaient à un rassemblement pour la paix. À trois semaines des législatives qui s'annoncent décisives, la Turquie est ébranlée par des actes d'une grande violence. Plus d'une centaine de personnes ont également été blessées par cette double déflagration survenue devant la principale gare d'Ankara. Le lieu n'est pas anodin, c'est là où se rassemblaient les délégations de syndicats et de partis politiques de gauche, dont le principal parti pro-kurde, venues de toute la Turquie pour cette manifestation. Le ministère turc de l'Intérieur a affirmé que la double explosion a fait au moins 86 morts et une centaine de blessés, évoquant l'hypothèse d'un attentat. «Nous maudissons et condamnons cette attaque atroce qui a visé notre démocratie et la paix dans notre pays», a déclaré le ministère. Cette double explosion intervient à trois semaines des élections législatives anticipées prévues le 1er novembre, sur fond d'affrontements meurtriers et quotidiens entre les forces de sécurité turques et les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le Sud-est du pays à majorité kurde. L'attaque pourrait sérieusement retarder la possibilité d'un compromis entre le gouvernement turc et les irréductibles mouvements kurdes. Lors du scrutin législatif du 7 juin dernier, le parti du président Recep Tayyip Erdogan a perdu la majorité absolue qu'il détenait depuis treize ans au Parlement. Notamment en raison du bon score réalisé par le parti pro-kurde HDP. Après l'échec des négociations pour la formation d'un gouvernement de coalition, Erdogan a été contraint de convoquer des élections anticipées pour le 1er novembre. De très importants effectifs de police ont été dépêchés autour de la gare d'Ankara, un des lieux les plus fréquenté de la capitale. La police a été contrainte de tirer des coups de feu en l'air pour disperser des manifestants en colère protestant contre la mort de leurs camarades aux cris de «policiers assassins». La chaîne d'information turque NTV a diffusé des images montrant des militants chantant et dansant la main dans la main avant d'être précipités au sol par la violence d'une explosion. Les similitudes avec un attentat récent ont été vite remarquées par les observateurs. Le 20 juillet dernier, une attaque suicide attribué au groupe Daech avait fait 32 morts parmi des militants pro-kurde dans la ville de Suruç, toute proche de la frontière syrienne. L'agence de presse progouvernementale Anatolie a indiqué que les autorités soupçonnaient l'explosion d'Ankara d'être l'œuvre d'un kamikaze. Après l'attentat de Suruç, de violents affrontements ont repris entre l'armée turque et les rebelles du PKK, qui ont fait voler en éclat un précaire cessez-le-feu qui tenait pourtant depuis mars 2013. M. B./Agences