Les parlementaires algériens entendent se démarquer et mener leur action de protestation jusqu'au bout. Après leur mouvement de protestation au sein même de l'Assemblée populaire nationale, la semaine dernière, le jour du vote du projet de loi de Finances 2016, les députés de l'opposition ont lancé, jeudi dernier, une pétition dans l'espoir de faire avorter cette loi au Sénat. Il faut dire qu'il s'agit là de l'unique alternative que les députés de l'opposition ont devant eux. Derrière cette action, se trouve les élus du Parti des travailleurs (PT), de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) ainsi que du Front pour la justice et le développement (FJD). Les parlementaires protestataires annoncent que leur mouvement sera rallié par certains députés de la majorité. Le député de l'Alliance verte, Abdelaziz Belkaid, également membre de la Commission des Finances, nous dira : «Nous avons communiqués avec certains membres de la majorité, dont je ne pourrais pas vous citer les noms, mais ils refusent tout comme nous que cette loi passe.» Cette majorité même qui, lundi dernier, avaient, rappelons-le voté en faveur du PLF-2016. Selon notre interlocuteur, «une vingtaine de députés devraient signer ladite pétition». «Nous nous attendons à avoir plus d'une centaine de signataires, même que certains issus de la majorité vont nous rejoindre dans ce mouvement», a-t-on fait savoir auprès du Mouvement pour la société et la paix. A propos de cette pétition, le président du groupe parlementaire du Parti des travailleurs, Djelloul Djoudi, a expliqué aux médias qu'ils visent «à demander à nos collègues au Conseil de la nation de ne pas adopter ce projet qui va replonger le consommateur algérien dans la pauvreté». Les dés sont jetés, faut-il le préciser, maintenant que la majorité a validé le projet en question voté la semaine dernière. Et au Sénat, une chose est certaine, le projet de loi de Fiances 2016 passera comme lettre à la poste, sommes-nous tentés de dire. Néanmoins, estime-t-on auprès du parti du Mouvement pour la société et la paix (MSP), par le biais de son premier responsable, il s'agit plus d'un devoir que d'une conviction. «Nous avons lancé cette pétition plus par devoir que par la conviction de pouvoir changer les choses», a déclaré Abderrazak Makri, cité par la presse, avant d'ajouter : «Personnellement, je ne pense pas qu'elle va être avortée car le Président lui-même n'est plus en exercice. Il y a plusieurs personnes influentes qui activent et non pas lui, donc je ne crois pas que les choses vont changer.» Mais les parlementaires ne sont pas les seuls à faire montre de leur opposition. Plusieurs autres mouvements et syndicats de divers secteurs économiques s'apprêtent à monter au front, soucieux des conséquences à venir notamment pour les ménages algériens. La loi de Finances passée, les syndicats sont conscients que les répercussions seront néfastes sur le consommateur étant donné que ce dernier ne pourra pas subvenir à ses besoins avec l'augmentation des différents prix des denrées alimentaires et autres produits, à l'image des prix du transport et du carburant. Comme un malheur ne vient jamais seul, dans le secteur des transports, les travailleurs de l'Entreprise de transport urbain et suburbain d'Alger (Etusa) ont décidé de paralyser partiellement la capitale. Ces derniers mènent leur débrayage depuis mercredi dernier, n'assurant qu'un service réduit. Derrière ce mouvement de grève, les travailleurs dénoncent une «injustice» à l'encontre de leur ex-directeur général, lequel a été remercié dernièrement. Pour les syndicalistes de l'Etusa, le PLF-2016 ouvrira les portes vers la privatisation. C'est pourquoi, «nous ne voulons pas de l'ouverture du capital de l'entreprise ni de sa privatisation comme l'insinue la loi de Finances 2016», disent-ils en insistant sur le fait que «cette loi va mener l'entreprise à sa perte et mettra fin au caractère public du secteur». Les spéculations et l'annonce portant l'adoption de la loi a laissé place à un climat de déstabilisation. En fin de semaine dernière, les travailleurs de la Société nationale des véhicules industriels (Snvi) ont pris le chemin de la protestation en sortant dans la rue réclamer leur salaire du mois de novembre, rappelons-le. Conscients que les nouvelles coupes et suspensions progressives des subventions sur les produits de nécessités, mais aussi l'impact que cela aura sur leur société qui emploie pas moins de 7 000 personnes, les syndicalistes ont manifestés leur crainte. Même crainte affichée par le Syndicat national des travailleurs de l'électricité et du gaz (Snateg), qui a exprimé ses inquiétudes de la possibilité que pas moins de 7 000 employés au sein du Groupe Sonelgaz soient licenciés. A l'origine de cette crainte partagée de l'ensemble des syndicats, les mesures de privatisation contenues dans l'article 66 du projet de loi de Finances 2016. Le président de l'Association de protection et d'orientation du consommateur et son environnement (Apoce), Mustapha Zebdi, cité par les médias, exprimera la totale opposition de l'organisation qu'il préside à «toute levée de subventions sur les produits avant qu'il n'y ait un fichier national des familles nécessiteuses, et une définition du concept de famille nécessiteuse, car une famille de cinq membres avec des ressources de moins de 50 000 DA est une famille nécessiteuse». M. B.