Photo : S. Zoheir Par Hasna Yacoub Accusé de «collaboration avec un Etat étranger», Nourredine Benziane, psychologue et expert en matière de lutte antiterroriste, a été condamné, dimanche soir, à quatre ans de prison par le tribunal d'Alger. Nourredine Benziane était mandaté par une organisation internationale basée à Vienne, sous l'égide de l'ONU, pour effectuer plusieurs missions en Irak entre 2005 et 2007. A la tête d'une délégation forte de 49 médecins, toutes nationalités confondues, le psychologue algérien a, au cours d'une de ses missions, début 2006, remarqué un entraînement militaire d'individus civils. Curieux, comme il le rapportera dans ses aveux, il se renseignera auprès de son chauffeur pour apprendre qu'il s'agissait là de futurs kamikazes chargés de commettre des attentats dans le monde. Sa spécialité étant de faire des analyses sur la lutte antiterroriste et le crime organisé, Nourredine Benziane s'intéressera de plus près à ce groupe et relèvera, en écoutant les conversations des individus, qu'il était composé de plusieurs nationalités, en l'occurrence des Thaïlandais, des Maghrébins, des Egyptiens…. Il en conclura que des attentats étaient en préparation pour être perpétrés dans plusieurs pays, dont la France, l'Espagne, les Etats-Unis, le Maroc et la Mauritanie. Au cours de sa troisième mission en Irak, Nourredine relate une autre découverte. Hébergé dans une caserne britannique à Bassorah, pour des raisons de sécurité, il fût hélé d'un vasistas situé au-dessus du niveau de la cour où il se promenait de nuit, par des individus retenus prisonniers. Selon ses déclarations, parmi ces derniers, certains étaient des diplomates russes. Ceux-ci lui ont demandé de leur porter secours en avisant leurs proches. Le lendemain, au cours d'une sortie en hélicoptère, l'appareil dans lequel il se trouvait sera la cible de tirs. Blessé dans différentes parties du corps, il sera soigné avant d'être évacué vers l'Algérie. L'accusé affirme avoir rendu compte aux services de sécurité algériens qui l'auraient accueilli à l'aéroport, de ses découvertes. Quelque temps après son retour, il a décide de prendre attache avec l'ambassade de Russie avec laquelle il avait «entretenu des relations professionnels». Reçu à la chancellerie pour présenter ses preuves (photographies des détenus), des responsables lui auraient «proposé une récompense de 10 millions de dollars», comme le dira son avocat, Me Chorfi, lors de sa plaidoirie. Nourredine Benziane a ensuite réclamé, explique le défenseur, un million d'euros «pour réaliser le projet d'un centre de recherche en Algérie». Une fois les renseignements obtenus, les Russes ne donneront aucune suite à sa demande. Nourredine décide alors de saisir par courrier différentes ambassades pour les aviser de son analyse, faisant état de la préparation d'attentats contre leurs pays. Seul le Qatar fera suite à son envoi et l'invitera à faire le voyage à Doha pour s'expliquer. C'est à sa sortie de l'ambassade de Qatar, le 27 avril 2007, après avoir récupéré son passeport comportant le visa de ce pays, qu'il sera appréhendé par les services de sécurité. Après son audition par ces derniers, il sera remis aux mains de la police qui ouvrira une information à son sujet. C'est ainsi que le juge d'instruction décidera de son incarcération sous l'inculpation de «collaboration avec un Etat étranger», conformément à l'article 71 du code pénal. Pour le ministère public, qui a requis une peine de vingt ans de prison, l'accusé n'a pas prévenu les autorités algériennes et s'est autorisé de faire part de ses informations à des pays étrangers en réclamant un million d'euros. L'avocat du prévenu a tenté d'expliquer que son client est un expert de la lutte antiterroriste et qu'il a réalisé plusieurs études, notamment sur le profil des terroristes pour le compte de plusieurs pays et qu'il était tout à fait normal qu'il monnaie son analyse, même si, fera-t-il remarquer, il n'a pas réclamé d'argent mais seulement accepté une récompense proposée par la chancellerie russe. Me Chorfi a essayé de démonter aussi que même si son client a exigé de l'argent contre ses «études et analyses», cela ne pouvait lui valoir une inculpation par l'article 71 du code pénal. Me Chorfi a alors demandé la relaxe de son mandant. Pas du tout convaincu, le juge prononcera une condamnation à quatre années de prison ferme.