Les services de sécurité affectés à la Protection du patrimoine archéologique et des biens culturels font leur travail et procèdent souvent à des saisies de pièces archéologiques et à l'arrestation de trafiquants qui tentent de passer les frontières avec ces trésors inestimables, témoins de l'Histoire de l'Algérie. Ces pierres qui parlent et racontent ce pays sont la plupart du temps à l'abandon et font l'objet de pillages par des individus connaisseurs ou ignorants de l'importance de ces sites historiques. Le site de Madauros, l'université où a étudié Saint Augustin, actuellement M'Daourouch, dans la wilaya de Souk-Ahras, de Khemissa (Tubirsicum Numidarum), Mechta El Qoseiba, Tiffech, Ouled Driss, la citadelle byzantine, la vieille ville, l'Antique Hippone, la citadelle Hafside sont autant de richesses abandonnées et presque sans protection où les pillages se font à longueur d'année. Ces forfaits ne concernent pas seulement ces sites cités à titre d'exemple, le mal est encore plus profond et touche l'ensemble des sites du pays malgré la lutte contre ce phénomène. En effet, en l'espace de 10 ans, de 2005 à 2015, les brigades de Gendarmerie nationale ont récupéré au niveau du territoire national, 22 535 pièces archéologiques dans 372 affaires et arrêtés 450 individus impliqués dans ce trafic qui a pris de l'ampleur et qui menace sérieusement les sites par le fait de ces pillages. Selon les statistiques établies par la Gendarmerie nationale, ce trafic concerne particulièrement l'est algérien où les brigades spécialisées ont dressé 312 PV représentant 69% de la totalité des affaires traitées, le nombre de sites situés à l'Est du pays est élevé et d'une grande richesse archéologique. Ce trafic qui constitue une véritable saignée du patrimoine vise essentiellement les pièces de monnaie et les médailles car faciles à dissimuler et à transporter, la vente se fait via internet ou à l'étranger après avoir passé les frontières. Elles représentent à elles seules 93% de ce trafic. Rien qu'en 2014, 7 230 pièces archéologiques ont été remises aux départements concernés, 56 affaires de trafic ont été traitées et dans lesquelles 58 individus impliqués ont été arrêtés et présentés à la justice. L'ampleur de ce trafic est telle que certains individus en ont fait leur métier allant jusqu'à consulter des cartes archéologiques pour repérer les édifices susceptibles de receler ce type de pièces et ainsi ne pas perdre de temps en cherchant. Et donc l'action de ces pilleurs ne prend pas beaucoup de temps, ce qui complique la tâche des services de sécurité appelés à protéger ces sites. Les directions de la culture avec les départements archéologie ne portent pas vraiment un intérêt particulier à ces sites qui sont la plupart du temps à l'abandon et livrés aux caprices du temps et de la nature mais aussi à l'ignorance et à la cupidité de certains. En effet, tout ce qu'on a concédé comme protection se limite à la construction de clôture métallique ou en dur sans se soucier de ce qui est à l'intérieur. Ces clôtures parfois éventrées deviennent une voie de passage emprunté par des personnes ou par des troupeaux qui viennent paître en ces hauts lieux de l'Histoire. Des pieds qui foulent allégrement des mosaïques, qui écrasent des restes d'outils ou de statuettes enfoncées dans le sol, des murets qui tombent en ruine ou des pierres avec des inscriptions puniques ou romaines qui disparaissent sous l'effet des phénomènes naturels font disparaître à jamais des pans entiers de l'Histoire du pays. Dernièrement à Annaba, une équipe d'archéologues a réalisé une étude en vue de la restauration du site d'Hippone situé à l'entrée Est de la ville, une initiative qui a suscité de l'espoir au vu de la situation catastrophique de ce site qui était complètement abandonné. Une action de désherbage des lieux a été réalisée pour mettre en valeur les ruines en attendant les travaux qui seraient lancés incessamment. Mais ce qui pourrait encore plus préserver le site de tout pillage ou destruction, ce serait une action de la direction de la culture en direction de ce site en organisant des visites pour écoliers, lycéens et universitaires dans un premier temps et par la suite les généraliser pour toucher un public plus large. La fréquentation continue de ce site le mettrait à l'abri de ces incursions qu'elles soient intéressées par le pillage ou juste pour en faire un passage. En attendant cela, le site périclite et continue sa descente aux enfers pour disparaître définitivement au grand dam des amoureux de la culture, des historiens et de tous ceux pour qui ce site représente un repère de l'Histoire de l'Algérie. M. R.