Le jury du 3ème Festival national du théâtre professionnel, qui s'est clôturé le 4 juin dernier, s'est abstenu d'attribuer le prix du meilleur scénario. La raison ? Parce que, tout simplement, les textes présentés n'étaient pas méritoires. La majorité des pièces théâtrales en compétition durant les dix jours qu'a duré la manifestation étaient des adaptations et non des scénarios originaux. Aussi le jury a-t-il souhaité qu'à l'avenir il y ait des textes de qualité et qu'on travaille à la recherche et à la promotion de nouveaux talents afin de permettre au théâtre d'être au diapason de la société et de se réconcilier avec son public. L'invitée d'honneur de cette 3ème édition, l'actrice égyptienne Samiha Ayoub, bien qu'estimant, de manière générale, moyen le niveau des représentations théâtrales, renchérira en affirmant que les talents existent et que le niveau du théâtre algérien s'améliore d'année en année. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire dans le domaine du scénario, précisera-t-elle. Le jury et la comédienne ont résumé en quelques mots un des points faibles du 4ème art en Algérie. Responsables et professionnels du théâtre s'accordent d'ailleurs à dire que l'écriture théâtrale a fortement reculé, en quantité et en qualité, pour ne pas dire a disparu. Il y a bien quelques actions qui sont entreprises ici et là en direction de jeunes auteurs, mais aucune n'a débouché sur la révélation d'un auteur talentueux que les metteurs en scène se disputeraient. Et les quelques scénaristes qui alimentent la production théâtrale excellent plus dans l'adaptation -qui a aussi sa valeur et son importance pour le théâtre- que dans la création. A telle enseigne qu'on s'est retrouvé avec un festival d'adaptations. De plus, la majorité des textes sont l'œuvre de personnes évoluant déjà dans le monde du théâtre, où un nouveau venu aura du mal à s'introduire. Le sang neuf qui pourrait non seulement reconquérir le public qui a tourné le dos au théâtre, mais aussi en former un nouveau, n'est pas encore dans le circuit, ou il est dilué jusqu'à ne plus avoir aucune influence qui pourrait changer et déranger l'ordre établi. Mais la rareté des textes n'est qu'un problème parmi d'autres qui minent l'activité théâtrale, et dont le plus important est celui du manque de moyens et d'infrastructures. Nombre de metteurs en scène et de responsables de théâtre nous ont affirmé que le manque de moyens les oblige à privilégier les pièces où il n'y a pas beaucoup de personnages –l'idéal est le one man show– et qui ne nécessitent pas des décors trop lourds, financièrement parlant. Ce manque de moyens est aussi un frein à la large distribution des pièces. Et si quelques pièces ont pu tourner, en Algérie seulement, c'est grâce à un budget spécial accordé par le ministère de la Culture pour la socialisation du 4ème art. Il reste que c'est du conjoncturel et qu'il est plus que nécessaire de diversifier les sources de financement de la production et la distribution théâtrale. Quant aux infrastructures, le nombre de théâtres existants illustre parfaitement ce manque. Un théâtre pour toute la capitale. Idem pour les autres grandes villes, Oran, Constantine, Annaba, Tizi Ouzou ou Béjaïa. Pis, Alger a même un théâtre pour enfants, le seul, à Riadh El Feth, qu'elle a laissé transformer en cabaret lumpen, sans qu'aucun responsable pouvant s'y opposer l'ait fait. Paradoxalement, c'est le théâtre pour enfants qui est le plus actif et le plus productif. On est en train de former un public de petits accros du théâtre. Il faut donc dès aujourd'hui penser à ces enfants quand ils deviendront grands. Ce sera le public de demain. Au théâtre d'être au rendez-vous… H. G.