La Turquie est décidément la tête de… Turc de l'Europe. En football comme en politique, le désamour est le même à l'endroit de ce mal-aimé de l'Europe à 27. Si cette grande nation musulmane n'est pas encore dans l'Union européenne (UE), ses émigrés, ses produits et son football sont déjà dans l'Europe. La qualification épique de son équipe pour les quarts de finale a révélé à une Eurofoot incrédule que cette nation eurasiatique est aussi un grand et vieux pays de football. La sélection nationale a été créée en 1923, l'année de la proclamation de la république. 25ème au classement FIFA, elle n'a certes jamais gagné un trophée majeur. Juste bonne pour les accessits, elle a tout de même à son actif deux participations à l'Euro en 1996 et en 2000. Les étoiles du croissant musulman ont sur leur CV une ligne d'or, la 3e place au Mondial 2002. Cette année là, le sort, maléfique à souhait, avait mis sur leur chemin le Brésil. La Turquie, c'est le bonheur d'être solidaires. Par sa façon de jouer, de lutter, d'attaquer sans jamais désespérer ou lâcher prise, cette équipe a administré une leçon de cran, de courage et d'opiniâtreté. Cette morale est presque une lapalissade : tant qu'il n'est pas fini, un match n'est pas encore joué. Si, dit-on, la politique est l'art du possible, le football est parfois l'art de… l'impossible. Dimanche 15 juin 2008, l'impossible était turc. A l'évocation de la renversante fin de rencontre contre des Tchèques douchés et coulés, on use vite le registre des superlatifs et des clichés. Forts et têtus comme des Turcs, héroïques, volontaires, hargneux, etc. Effectivement, les Turcs sont habitués aux folles fins de matches et savent renverser la vapeur. La Suisse en sait quelque chose. Le bouillonnant mais madré Fatih Térim, qui a l'habitude de faire jouer son équipe en 4-3-3, a gagné contre des Tchèques trahis quand même par un piètre Petr Cech, en un 4-2-2 dynamique qui a favorisé le mouvement des joueurs. A la fin du match, les vagues étaient rouges et le désespoir tchèque était de blanc vêtu. Le football turc porte les consonances et les résonances de son football de club. La sélection est au diapason de clubs qui ont acquis la culture de la gagne. Si elle est formée notamment de joueurs évoluant dans les meilleurs championnats européens (Espagne, Angleterre…), Fenerbahce, Besiktas, Galatasaray, Ankarasports sont désormais des habitués des grands rendez-vous du football européen des clubs. La sélection n'a pas que des ressources mentales exceptionnelles. Elle possède aussi des joueurs de grand talent, de la race des individualités qui forcent la décision et le destin. A l'image du joueur de Villareal, l'avant-centre Nihat Kahveci, qui a marqué 2 buts en 3 minutes. A l'instar de Hamit Altintop, toujours au top, avec 3 passes décisives contre les Tchèques. Fort comme un Turc, le cliché a encore de beaux jours… N. K.