Les étudiants de l'université de Béjaïa ont invité, dimanche dernier, Moussa Touati, président du Front national algérien, et Karim Tabbou, premier secrétaire national du FFS à débattre de l'élection présidentielle du 9 avril prochain. Jusque-là, la chose peut paraître banale. Mais il se trouve que les deux personnalités ont des regards totalement opposés : le premier est un candidat à l'élection présidentielle et le second un des partisans les plus acharnés du boycott du scrutin. C'est dire la teneur et la portée du débat. Mais au-delà des parcours, très contrastés, de l'une ou de l'autre personnalité, et loin des clichés qui peuvent entourer ce genre d'évènements, il faut reconnaître de prime abord que l'initiative estudiantine mérite estime et considération, au même titre d'ailleurs que les deux contradicteurs et les autorités universitaires. Parce que cela fait bien longtemps que le pays a manqué de débat sérieux sur des questions aussi sérieuses que la pratique politique ou une élection présidentielle. On a plutôt l'habitude de voir des échanges vifs et sortant, souvent, de leur cadre pour devenir de l'insulte et de l'invective. Cette situation a constitué l'essentiel des échéances politiques et des interventions des personnalités nationales depuis l'instauration du multipartisme en 1989, à l'exception de la brèche ouverte en 1991 avant les élections législatives interrompues en décembre de la même année.A la place d'un débat d'idées, nous avons, donc, plutôt assisté à des échanges d'accusations. La chose est valable et pour l'opposition et pour une bonne partie des personnalités du pouvoir. L'exemple le plus édifiant en cela est sans doute l'élection présidentielle d'avril 2004 lorsque la situation a même failli déraper vers la violence. Pourtant, ce n'était qu'un débat… C'est cette vertu de l'échange d'idées qu'ont voulu nous transmettre les organisateurs de ce débat qui a eu lieu à l'université de Béjaïa, cette citadelle du débat démocratique. Pourtant, le ciel n'est pas tombé, comme le dit l'adage populaire. Il y a eu débat et c'est au public de juger qui a raison et qui a tort ; ou c'est plutôt à l'assistance qu'échoit le rôle de séparer le bon grain de l'ivraie. Cela donne naturellement à réfléchir. Parce que, en fin de compte, qu'est-ce qui empêche ce genre de débats d'avoir lieu ? Rien en principe. Puisque toutes les lois relatives à la pratique politique le permettent, à condition de respecter un minimum de civilité. Il est à espérer que ce genre d'initiatives se multiplie. Pas seulement dans l'enceinte universitaire, mais dans toutes les arènes possibles. Y compris dans les médias. Mais pas seulement en période électorale, mais tout au long de l'année. Cela permettra d'offrir de vraies alternatives aux citoyens et apaisera, également, la scène politique nationale. A. B.