Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Constantine A. Lemili Les services de l'agriculture ont organisé un cycle de rencontres avec les paysans et les agriculteurs de la wilaya de Constantine. Celle tenue hier au centre culturel M'hamed Lyazid du Khroub a regroupé les agriculteurs des communes de ladite daïra, une région réputée pour la culture maraîchère mais également céréalière. Les deux cents personnes présentes ont été informées de vive voix et de la manière la plus vulgarisée possible sur les mesures prises et mises en application dans le cadre de la nouvelle politique d'orientation agricole, mais aussi de celles d'accompagnement devant les confirmer par l'effet sur le terrain. Le directeur des services agricoles s'est voulu le plus persuasif et le plus didactique, et pour cause, dans son explication des grands axes relatifs au renouveau du secteur et aux attentes des institutions de l'Etat sur un défi appelé à sortir le pays de sa dépendance sur le plan agroalimentaire et pourquoi pas envisager l'exportation pour certaines filières. Bien entendu, l'Etat ne donnera rien pour rien et les travailleurs de la terre sont appelés à s'impliquer sérieusement dans les objectifs arrêtés pour le prochain quinquennat où les efforts des pouvoirs publics en matière de financement sont de l'ordre de l'exceptionnel depuis l'accession de l'Algérie à l'indépendance. L'effacement des dettes des agriculteurs décidé par le président de la République lors de la conférence nationale tenue en février dans la wilaya de Biskra en est l'acte le plus important et forcément le premier jalon de la politique salvatrice de l'Etat à l'endroit du secteur. Les cadres de la DSA qui interviendront tour à tour argumenteront, taux d'intervention, voire de prise en charge de l'Etat à l'appui, que toutes les démarches qu'entreprendrait un paysan seraient actées par une aide conséquente des institutions nationales, en l'occurrence les banques de développement rural et nationale comme en témoignent les conventions établies et signées à ce sujet. «La régulation du secteur agricole entreprise déjà avec notamment le Syrpalac nous conforte sur le choix opéré et ne peut que nous contraindre à multiplier des procédures incitatives qui n'iront de pair, toutefois, qu'avec la modernisation de l'administration et des techniques de production.» D'où l'idée de revenir sur le contrat de performance adopté il y a quelques semaines par le wali, le DSA et le conservateur des forêts. En fait, le contrat de performance est sans doute la pierre d'achoppement d'un processus sur lequel les pouvoirs publics cultivent une grande appréhension pour ne pas dire gardent d'énormes craintes en ce sens qu'ils théorisent trop une pratique naturelle du travail de la terre que les paysans perçoivent autrement que par l'impartition d'objectifs de production, de productivité, de rendements, d'évaluation, de taux d'intégration, d'utilisation rationnelle des techniques d'irrigation, de respect de l'environnement, de préservation des ressources hydriques et, enfin d'élaboration d'indicateurs de développement. C'est ce que soulignera d'ailleurs à notre intention un important propriétaire terrien qui n'a pas jugé opportun de regagner la salle avec un nombre non négligeable de ses collègues au motif que «les partenaires les plus importants, en l'occurrence les banques, sont absents». Une remarque non dénuée de fondement dans la mesure où à l'unanimisme général mais de façade auquel semblent être parvenus tous les acteurs concernés par les mesures prises dans le cadre du renouveau agricole répond une cacophonie générale dans leur application sur le terrain. Et nombreux sont les paysans, agriculteurs importants et gros propriétaires terriens, à reconnaître que «rarement les décisions sont prises après étude du terrain ou de la réalité de la situation et plus anarchique est a posteriori l'application des mesures prises sur le… terrain». Coût soutenu à la production, primes conséquentes à la vente, aides à l'équipement, suppression de la TVA pour le matériel, les intrants, les produits vétérinaires intéressent très certainement au plus haut degré les agriculteurs mais les laissent malgré tout dubitatifs sur le parcours du combattant pour faire suivre d'effet toute la machine.L'échec du stockage de la pomme de terre et la flambée dudit tubercule sur le marché en sont le plus grand indicateur, même si le directeur de l'agriculture ne jure que par «la réussite du Syrpalac qui pourrait s'étendre à d'autres produits nationaux». Enfin, s'agissant de l'effacement des dettes, les agriculteurs que nous avons rencontrés demeurent évasifs sur la réelle portée de la mesure, certains d'entre eux n'hésitant pas à soutenir que la majorité des créances détenues par les banques ne concernaient en fait que les agriculteurs qui ont les moyens de s'en acquitter et qui écoulent leurs produits à 800 DA le kg (cerise) et 700 (nectarine). Sinon les autres ne sont endettés parfois qu'à concurrence de 100 000 dinars.