«J'assumerais mon rôle d'opposant.» En prononçant cette phrase, lourde de sens, le 11 mars dernier au cours d'une conférence de presse à Alger, Ali-Fawzi Rebaïne, le candidat de Ahd 54 (moins de 1% lors du scrutin de 2004) à l'élection présidentielle savait pourtant que ses chances de remporter le scrutin n'étaient pas à la mesure de ses ambitions, lui qui, quelques jours auparavant, ne savait même pas s'il était capable de récolter les 75 000 signatures. Il a décidé, pourtant, de se jeter dans la bataille, contre vents et marées. Mais contre un seul «adversaire». «Je n'ai qu'un seul concurrent : Abdelaziz Bouteflika», disait-il avant le début officiel de la campagne électorale. L'homme semble être sûr de lui, malgré un manque criant de moyens financiers et matériels en comparaison, notamment, du chef de l'Etat sortant. Au premier jour de la campagne électorale, le 19 mars dernier, donc, l'opticien et membre fondateur de l'Organisation des fils de chouhada, est parti chasser des voix sur les terrains de… Abdelaziz Bouteflika, à Remchi, une commune rurale située à l'ouest de Tlemcen. Et la tournée occidentale de Ali-Fawzi Rebaïne a duré sept jours. Le temps d'une conquête, où le candidat a su parler au peuple. Chômage, corruption, souveraineté et attaques en règle -le plus virulent des six candidats- contre «le régime» et, surtout, l'actuel chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika. «L'Etat a conduit à créer deux couches sociales : l'une de pauvres pour la majorité, et l'autre de nantis avec une proportion importante de milliardaires, ceux-là mêmes qui financent la campagne du candidat Bouteflika dont un seul rassemblement a coûté 51 milliards de centimes», a-t-il dit le 19 mars dernier à Remchi, devant une assistance moyenne. Le la est donné. C'est le discours que le candidat développera tout au long des 19 jours qu'a duré la campagne. Deux jours plus tard, il récidive à Télegh, dans la wilaya de Sidi Bel Abbès -le candidat dit préférer les petites localités pour s'approcher au mieux des citoyens- en s'attaquant, encore une fois, au pouvoir en place. «Les projets d'un million de logements et de deux millions de postes d'emploi n'ont jamais été concrétisés, et le pays est sévèrement touché par la crise que les décideurs tentent de cacher», a-t-il pesté pour contredire le Président candidat qui avance des chiffres des réalisations de ses quinquennats précédents. L'opposition de Rebaïne ne s'arrête pas là. Parlant de l'effacement des crédits des agriculteurs, il a tonné à Djelfa, le 25 mars dernier, que le «seul bénéficiaire de ces projets est la mafia issue des politiques qui se sont succédé depuis l'indépendance». Seulement, le candidat de Ahd 54 ne fait pas que critiquer. Il fait des propositions et se présente comme candidat des «zawaliya» (les pauvres). «Le peuple algérien vit une véritable misère et seul un changement peut redonner vie aux Algériens, notamment aux jeunes qui souffrent du chômage et ne pensent qu'à l'émigration clandestine», disait-il à Sidi Bel Abbès. «Les richesses dont dispose l'Algérie doivent être réparties équitablement entre les citoyens algériens, particulièrement parmi les catégories démunies», avait-il poursuivi, le jeudi 2 avril, à partir de M'sila. De plus, le candidat s'est interrogé à plusieurs reprises, à Djelfa par exemple, sur le fait d'importer des produits alimentaires pour un pays aussi riche et grand que l'Algérie. A côté de cela, le candidat de Ahd54 a traité d'autres sujets importants. Il s'est attaqué, à plusieurs reprises, aux médias tout en défendant «la liberté de la presse». Il a, également, défendu l'officialisation de la langue amazighe. «C'est simple : j'ajouterai une phrase à la Constitution indiquant que tamazight est langue nationale. Et le problème est réglé», avait-il soutenu. Le candidat a aussi insisté, dans certains meetings, sur l'investissement dans le capital humain, notamment à travers la formation de la jeunesse. Et, Ali-Fawzi Rebaïne a refusé de servir de «faire-valoir à quiconque», tout comme il s'est défendu d'être «un lièvre». A. B.