Photo : Sahel Par Salah Benreguia Avant même d'être réélu pour le troisième mandat, Abdelaziz Bouteflika, n'a cessé de faire des remarques et de relever certains dysfonctionnements enregistrés au niveau de l'application de son programme économique. Des dysfonctionnements ayant engendré, pour mémoire, des retards dans la réalisation des chantiers. De ce fait, des remarques ont été émises par le chef de l'Etat, notamment lors des séances d'audition consacrées à ses différents ministres en septembre 2008. Des rencontres au cours desquelles il n'a pas manqué d'inviter les responsables de ces départements ministériels à accélérer la cadence. Parallèlement, et en ces temps de crise économique mondiale, Abdelaziz Bouteflika a vivement suggéré l'utilisation de manière rationnelle des enveloppes financières allouées aux différents projets. Cette rationalisation s'avère en réalité nécessaire, notamment avec cette crise qui a engendré une baisse sur la demande de pétrole, synonyme d'une diminution des recettes d'hydrocarbures. L'observateur assidu de la scène politico-économique nationale remarquera à coup sûr que le premier magistrat du pays n'a pas attendu sa réélection, pour la troisième fois à la magistrature suprême, ou mieux, la campagne électorale, pour donner le la. La série des mesures et de remarques ainsi que des «rappels à l'ordre», a commencé lors de l'audition du ministre des Finances. Et la rencontre avec Karim Djoudi a emboîté le pas avec d'autres ministres. Au final : les nombreux dossiers, principalement économiques, de grande importance nécessitent, suggère Bouteflika, une meilleure prise en charge durant le prochain mandat, vu l'immense retard enregistré sur le terrain. Egalement, les auditions du président avec ses ministres, lui ont permis de peaufiner son programme pour le prochain quinquennat à travers des orientations en direction des différents départements ministériels. «Nous devons renforcer notre visibilité sur l'avenir à moyen et à long terme... J'entends donc que cette démarche soit mise en œuvre lors de la préparation du prochain programme quinquennal pour la période 2009-2014… et j'entends également que ce futur programme accorde la priorité aux projets ayant fait l'objet d'études préalables pour leur lancement sans retard ni réévaluation.» C'est en ces termes que Bouteflika s'était adressé, pour rappel, au ministre des Finances, Karim Djoudi. Le principal défi : une économie productive Tout porte à croire que la politique économique pour les cinq ans à venir aura un léger lifting par rapport à celle de deuxième mandat. En sus de l'approfondissement des initiatives déjà entreprises, de l'application des correctifs nécessaires aux politiques mises en œuvre et l'ouverture de nouveaux chantiers, «Bouteflika acte III» cherchera à mettre en place, aux dires des experts, un système économique productif puisque le dernier quinquennat a été particulièrement consacré à la réalisation d'infrastructures de base et autres moyens nécessaires à la construction d'une économie diversifiée indépendante des hydrocarbures. Les pouvoirs publics, ajoutent les mêmes sources, compteront mettre à profit le climat macroéconomique algérien de plus en plus encourageant. En clair, avec des indicateurs macroéconomiques au vert, notamment le remboursement de la dette extérieure et la viabilité de la balance extérieure à travers l'augmentation continue des réserves de changes, les responsables algériens, à leur tête Bouteflika, veulent booster notre économie en amont et en aval. Autrement dit, l'équipe gouvernementale algérienne, en dépit des chiffres montrant que des pas ont été franchis, comptent mettre le paquet pour améliorer la situation socio-économique du pays et, surtout, rendre notre économie plus compétitive, performante et productive. Les dernières mesures annoncées par le gouvernement (réglementation de l'investissement étranger, révision de la politique de privatisation, encouragement de l'agriculture...) entrent d'ailleurs dans le cadre de cet objectif. 150 milliards de dollars pour le prochain quinquennat Incontestablement, le volet économique occupe une place primordiale du programme du candidat Bouteflika. Ce dernier qui avait annoncé durant ses différents meetings qu'il opte pour la continuité des programmes déjà tracés depuis 10 ans, a promis mettre toute son énergie pour l'accélération de la cadence. Rappelant à maintes reprises que l'enveloppe de 126 milliards de dollars allouée pour le programme des cinq dernières années a permis notamment de remettre en place les infrastructures de base du pays et d'en réaliser d'autres, Bouteflika a affirmé que son programme pour les cinq prochaines années, (qui sera proposé dans le cadre de la prochaine loi de finances complémentaire), vise la réalisation de nombreux objectifs de développement économiques et sociaux, dont la construction d'un million d'autres logements, la création de 3 millions d'emplois et de 200 000 petites et moyennes entreprises (PME). Pour ce faire, Abdelaziz Bouteflika a, de prime, procédé à la création d'un Fonds national d'investissement, doté d'un capital social de 150 milliards de dinars et d'une capacité de financement de plus de 1 000 milliards de dinars. L'objectif visé par ce fonds, annoncé, pour rappel, lors de l'audition de Karim Djoudi, est d'avoir un outil qui facilitera la création d'entreprises et favorisera l'investissement pour les opérateurs algériens. Le candidat Bouteflika avait également laissé entendre, durant sa campagne, qu'en dépit des dernières mesures relatives aux investissements étrangers prises la fin de l'année dernière, et qualifiées par certains de «restrictions», l'IDE demeure le «bienvenu», mais qu'il se fera dans le cadre d'une politique de «partage de bénéfices». Comprendre par là que le gouvernement accorde également une importance à la promotion des investissements étrangers. Mais, ces IDE seront désormais taxés pour éviter les fuites de capitaux, en ce sens que les bénéfices des sociétés transférables à l'étranger seront ainsi assimilés à des dividendes et imposés à 15%. «L'Algérie ne s'opposera jamais à ces transferts mais on demandera aux entreprises de réinvestir ici une partie de leurs bénéfices. Faute de quoi, nous risquons de déséquilibrer notre balance des paiements», a expliqué récemment Abdelmalek Sellal, directeur de campagne de Bouteflika. Autre décision prise par l'Etat, à la fin de l'exercice 2008, celle obligeant les entreprises étrangères commerciales installées en Algérie à ouvrir leur capital aux sociétés nationales importatrices à hauteur de 30% au minimum. Deux mesures ayant fait couler beaucoup d'encre dans les milieux d'affaires étrangers, notamment français. L'explication fournie dans ce sens par les pouvoirs publics a trait au fait que la facture des importations a explosé à plus de 40 milliards de dollars, soit plus de la moitié des recettes d'hydrocarbures durant l'exercice écoulé. Selon les économistes, une tendance, qui aurait incité le gouvernement d'Ouyahia à prendre ces mesures protectionnistes. «Le protectionnisme est de retour à grands pas dans le monde. Nous aussi nous devons défendre notre territoire», a expliqué récemment Ouyahia. Pour conclure, experts et hommes politiques de différents bords se sont accordés à expliquer que les mesures prises par Bouteflika avant même le début de sa campagne électorale visent à poursuivre l'effort national déjà fourni durant les deux mandats, et sans préjuger des résultats de l'élection présidentielle du 9 avril dernier. Ils expliquent cela par le souci permanent du chef de l'Etat de créer, entre autres, de petites et moyennes entreprises (base de toute économie performante), grâce à l'accès au crédit et, surtout, grâce à la disponibilité du foncier industriel (régime de la concession) notamment via la multiplication de zones industrielles. Pour ce faire, l'Etat compte dépenser 150 milliards de dollars durant le prochain quinquennat.