Autrefois objet de méfiance, les fonds des Emirats arabes unis suscitent désormais de nombreux espoirs en Allemagne, où la crise fragilise les trésoreries des fleurons de l'industrie. Il y a un an à peine, pourtant, les fonds souverains incarnaient encore les financiers rapaces. L'été dernier, le gouvernement allemand avait adopté une loi limitant les investissements de ces fonds dans des secteurs stratégiques. Mais, depuis, le plus riche des Emirats arabes unis, Abou Dhabi, a racheté une filiale du conglomérat MAN, est devenu le premier actionnaire du groupe automobile Daimler et a investi dans une usine de panneaux solaires. Le fonds arabe a même été pressenti pour investir dans Opel, filiale de l'américain au bord de la faillite General Motors. Une rumeur alimentée y compris par des responsables politiques et démentie depuis. Il n'empêche, Opel ou pas, Abou Dhabi a récemment affiché son appétit pour les entreprises de la première économie européenne. «J'ai un avis très positif sur l'industrie allemande», avait ainsi déclaré le mois dernier à Stuttgart (sud-ouest) Khadem Al Qubaïsi, président d'Aabar, le fonds propriétaire de 9% de Daimler. «Quand on parle de l'Allemagne dans le Golfe, on parle de bonnes entreprises, de bonnes technologies, d'un bon management», avait-il ajouté. Des propos bien accueillis dans le pays, où la récession pourrait atteindre -4% cette année. La chute des Bourses a fait fondre la valeur de nombreux géants allemands. Et la chute de l'activité combinée à la raréfaction du crédit a rendu leur trésorerie exsangue. «Beaucoup de petits entrepreneurs qui n'obtiennent plus de crédits auprès des banques essaient de récupérer de l'argent arabe ou russe. Ce sont les seuls qui ont encore de l'argent», affirme Heino Wiese, consultant spécialisé. Conséquence : «Il va y avoir plus d'investissements directs, même si les managers des fonds n'ont pas été très heureux dans leurs investissements dans les institutions financières notamment aux Etats-Unis», selon les experts de la Frankfurt School of Finance. Les fonds veulent à la fois diversifier leur portefeuille en se tournant vers l'industrie et limiter leur exposition en dollar au profit de l'euro, rappellent-ils. D'autant qu'au-delà des espoirs suscités par Abou Dhabi ou Dubaï, les Allemands peuvent se targuer de bonnes relations avec les Emirats, nouées notamment par l'ancien chancelier social-démocrate, Gerhard Schröder. Celui-ci, reconverti dans les affaires, est un ami de la famille régnante d'Abou Dhabi. Il est aussi l'initiateur d'un partenariat signé en 2004 avec l'émirat sur les énergies renouvelables. Une relation privilégiée que le ministre de l'Economie, Karl-Theodor zu Guttenberg, entend conforter lors de sa visite dans la région, du 9 au 11 mai prochain.