Photo : Riad De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Faut-il vraiment attendre l'accroissement de la courbe relative à l'emploi des enfants de moins de 16 ans pour entreprendre des sanctions concrètes contre les différentes sources d'enrôlement ? C'est la problématique à laquelle ont tenté de répondre les présents à une rencontre initiée par l'Inspection régionale du travail de Constantine. Unanimes, les conférenciers recommandent l'application stricte des textes régulant cette «embauche de la honte...» Aucune statistique fiable ne vient infirmer ou confirmer le nombre d'enfants employés au noir dans les différents chantiers en Algérie. C'est un constat établi par l'Inspection du travail de la wilaya de Constantine au cours de la Journée mondiale de lutte contre ce phénomène, coïncidant avec le 12 juin, organisée au palais de la culture Malek Haddad. Ainsi, on s'est contenté de présenter des bilans inhérents aux continents asiatique et africain qui regroupent respectivement 126 millions et 48 millions de jeunes enfants exploités dans plusieurs secteurs. L'Afrique du Nord comprend 2,5 millions d'enfants travailleurs. En Algérie, la prévalence ne devrait pas dépasser 1%. Du moins, devant quelques entraves sur le terrain, il est difficile pour les enquêteurs d'établir un résultat assez fiable… Si l'Algérie demeure mieux nantie à l'échelle du Bassin méditerranéen en textes législatifs régulant et protégeant les enfants de l'exploitation par le travail, sur le terrain peu de sentences tombent à l'encontre des exploitants de cette frange de main-d'œuvre. C'est en clair le message en filigrane émis par les participants à cette Journée mondiale de lutte contre le travail des enfants organisée par l'Inspection de travail de la wilaya de Constantine. «Notre pays n'a certes pas atteint des proportions alarmantes à ce sujet comme c'est le cas en Asie ou en Afrique, toutefois, il importe de sensibiliser et de songer à créer une association locale susceptible de prévenir contre les aléas de cet enrôlement prématuré des enfants», a déclaré l'inspecteur régional. Pour sa part, le secrétaire général de l'Union locale des travailleurs algériens, M. Rahma, s'est montré plus virulent à l'égard des patrons contre lesquels il recommandera une «inculpation directe». «Il faut criminaliser les auteurs de ce fléau», a-t-il lancé avant d'ajouter : «La lutte devrait être permanente et ne se limite pas seulement à une date du 12 juin de chaque année.» La déclaration fracassante du secrétaire général se résume à l'annonce de 3 millions de travailleurs au noir en Algérie, dont 50% sont des jeunes de moins 16 ans. L'intervention du professeur Haddad, de la médecine du travail, s'articulera sur trois points essentiels se résumant à «l'application stricte et effectives des textes, la création de programmes adéquats au niveau des divers centres professionnels en vue de sensibiliser les futurs professionnels sur les éventuels risques du métier de leur choix». En d'autres termes, «il ne faut pas que le travailleur perde la vie en voulant la gagner», conclura-t-il. Evoquant le volet probabiliste sur la propagation du phénomène dans notre pays, on apprend que les chiffres existants ne couvrent pas vraiment la réalité du fait que les enquêtes effectuées dans les différentes sources de travail «ne parviennent pas à bénéficier de toutes les facilités pour mener à bien leur mission», déplore l'inspecteur régional. Toutefois, sur ce chapitre, l'inspecteur de wilaya M. Boudjemaa annoncera un faible pourcentage, selon une première prospection réalisée en 2002. Il ressort que, sur les 5 847 établissements publics visités, qui embauchent 168 954 travailleurs, seuls 95 parmi ces derniers sont considérés comme des «jeunes ouvriers» correspondant à 0,56%. Une seconde inspection, réalisée en 2006, indique que le taux de participation des moins jeunes était de 0,56%, comprenant 156 jeunes travailleurs sur les 28 840 dans les 3 853 entreprises visitées. La dernière étude relative à l'exploitation des enfants en bas âge s'est concrétisée en 2008. Le nombre n'avait pas enregistré une grande variation ; au contraire on y constate un léger recul. De fait, les 4 820 sociétés, avec leur effectif de 3 850, engageaient 68 jeunes ayant moins que l'âge requis au travail. En matière d'exploitation des jeunes, 0,17% sanctionnait cette année 2008.Ces chiffres ne confortent pas pour autant le quotidien des enfants, dès lors que les exploitants sans scrupules continuent d'en faire une source de revenus. Unanimes, tous les participants à ce conclave, -tenu sans la présence de la société civile-, estiment que les données restent en deçà de la réalité. L'inspection bute sur des problèmes quand il s'agit d'éplucher à fond ce dossier. Et ce, sans s'attarder sur les embuches alors que cette journée est conçue pour «tout» dévoiler. La DAS, qui a pris part à cette rencontre, est venue avec une batterie de textes régissant le monde du travail consacré aux enfants. Par ailleurs, elle dévoilera son action «de contrôle et d'éducation» durant l'année 2008 (le sujet a été traité par la Tribune dans un supplément thématique), en ayant opéré des sorties sur le terrain et dont les cibles ont été les marchés, la décharge publique de Aïn Smara, où des enfants s'adonnaient à la collecte de plastique et de ferraille, et quelques artères principales de la ville. Ainsi, 45 enfants, dont 29 scolarisés, effectuaient des travaux dans des souks. A la nouvelle ville Ali Mendjeli, la DAS avait recensé 15 jeunes travailleurs chargés de porter de lourds sacs de ciment. Il y a aussi l'exploitation des enfants à la mendicité. Pis, la direction de l'action sociale avait recensé l'existence d'un bébé de 15 jours exploité par des parents à cet effet. En conclusion, l'inspection devrait bénéficier de toutes les commodités et «facilités» pour dévoiler les vrais employeurs de ces bambins privés d'une vie normale.