Le coup d'envoi de la seconde édition du Festival panafricain d'Alger a été marqué ce samedi par un impressionnant engouement populaire : des centaines d'Algérois ont convergé, par processions, vers les différents points de passage de la caravane pour apprécier et mieux s'imprégner des sonorités exotiques et autres couleurs vives qui distinguent le continent noir. Un tel répondant traduit, on ne peut mieux, la soif qu'éprouvent les Algériens à se divertir, à décompresser, bref, à s'amuser. A s'amuser tout simplement pour échapper à un quotidien pas toujours plaisant et au poids des responsabilités et des soucis qu'impose un rythme de vie de plus en plus effréné. Cela est d'autant plus vrai que les Algériens sortent péniblement d'une décennie qui les aura affectés, d'une manière ou d'une autre, dans leur émotivité et psychisme. Une décennie marquée par une terreur rarement égalée et une psychose anéantissante où la distraction et la culture étaient bannies d'expression. Pis, ces derniers étaient interdits au nom d'une interprétation religieuse biaisée qui en faisait des maux à abattre et à combattre, car susceptibles de pervertir dangereusement la société. Depuis quelques années, les Algériens réapprennent petit à petit à vivre sans la peur, à sortir, à apprécier à nouveau la beauté des arts sous toutes leurs formes… Même si cet aspect n'est pas à lui seul suffisant à faire oublier les tracas ordinaires de la vie courante, il n'en demeure pas moins indispensable justement pour rendre plus supportable ce vécu. Le retour à la vie culturelle et d'animation s'est fait timidement et progressivement et beaucoup reste encore à faire tant que la culture n'a pas la place de choix qu'elle mérite dans notre pays. Car, ce n'est pas en organisant un festival, aussi grandiose soit-il, que cela peut témoigner de l'importance qu'accorde un pays à sa culture. En Algérie, nul n'ignore que ce secteur est le parent pauvre qui bénéficie tout le temps des plus faibles budgets de l'Etat. Et c'est précisément parce que les Algériens ne sont pas si bien servis que cela en matière de divertissement, de loisirs et de spectacles que le 2e Panaf a suscité autant d'engouement. Beaucoup de parents n'ont pas voulu rater l'opportunité de faire découvrir à leur progéniture un rare moment de joie et de distraction alors que la majorité des Algériens doivent se demander pourquoi la fête n'est pas au rendez-vous tout au long de l'année. Ce qui est certain, en revanche, c'est que la dimension régionale de ce festival, qui aura coûté énormément en temps et en argent, est de nature à servir la diplomatie algérienne en ce sens qu'elle la remette sur le devant de l'actualité. Pour notre pays, il est, par ailleurs, important de réussir le pari d'organiser une manifestation de cette ampleur et d'obtenir la confiance de tous les Etats africains qui y sont représentés par des délégations artistiques diverses. C'est, à tout le moins, l'un des principaux acquis de ce rendez-vous continental en attendant que la culture en Algérie le soit véritablement et durablement. Alors un Panaf tous les jours, avec ce que cela suppose comme esprit festif autant qu'instructif, est-ce possible ? M. C.