L'Italie est le pays européen le mieux préparé à une éventuelle crise gazière entre la Russie et l'Ukraine. Cette déclaration émanait du ministre italien du Développement économique Claudio Scajola. L'Italie pourra penser à la prochaine période hivernale avec plus de sérénité que les autres pays d'Europe «grâce notamment à sa coopération avec l'Algérie», avait-il dit, lors d'une rencontre avec des responsables russes il y a quelques semaines. Selon lui, la coopération avec l'Algérie a permis à l'Italie de «constituer des réserves de gaz suffisantes» lui permettant de faire face à la situation en cas de nouveau conflit gazier entre la Russie et l'Ukraine par laquelle transitent quatre-vingts pour cent du gaz russe destiné aux marchés de l'Union européenne. D'autres pays européens veulent aujourd'hui copier l'Italie en mettant en place des plans d'urgence pour faire face aux ruptures majeures d'approvisionnement comme celle du début de l'année suite à un conflit entre Moscou et Kiev. En début d'année, suite à un différend commercial entre l'Ukraine et la Fédération de Russie, le géant russe Gazprom avait interrompu ses livraisons gazières à l'Europe via l'Ukraine pendant deux semaines. Pareille situation a mis le Vieux Continent dans tous ses états. Les Européens savent qu'une «répétition de ce genre de crise est réaliste et ne peut pas être exclue. L'Europe peut et doit diminuer sa vulnérabilité aux interruptions de la fourniture de gaz», est-il souligné d'un projet de la Commission européenne sur le gaz. Explications : l'Ukraine a toujours du mal à régler ses factures de gaz russe, d'ailleurs les Russes proposent que des prêts lui soient accordés pour qu'elle puisse s'en acquitter. Dans de telles conditions, une nouvelle crise majeure pourrait causer de «graves dommages économiques dans l'UE», prévient Bruxelles, mettant en exergue le fait que les règles existantes «ne suffisent plus», surtout vu la dépendance croissante de l'Europe aux importations en gaz. Dans les douze mois qui suivront l'entrée en vigueur du texte, des plans d'urgence devraient être définis au niveau national, dans chaque pays de l'UE, en tenant compte des effets sur les pays voisins. La Commission européenne devra vérifier la compatibilité des plans nationaux entre eux et pourra faire des recommandations pour les modifier. Elle devra aussi, dans les dix-huit mois après l'entrée en vigueur du texte, mettre au point un plan d'urgence européen. Pour ce faire, le texte prévoit une disposition qui peut être qualifiée de «clause Gazprom». Les pays européens devront informer Bruxelles de tous leurs accords gaziers intergouvernementaux avec des pays tiers, et les entreprises lui notifier leurs contrats de plus d'un an avec des fournisseurs extérieurs à l'UE. Cela concerne en premier lieu le géant gazier russe. En cas d'urgence, la Commission pourra aussi demander à un pays européen d'utiliser ses réserves stratégiques de gaz, mais n'a pas réussi à augmenter autant qu'elle le souhaitait ses prérogatives. Le texte confirme ainsi la responsabilité des États de l'UE dans le choix des mesures et leurs «droits souverains [...] sur leurs propres ressources naturelles». Bruxelles veut aussi créer une force permanente, constituée d'experts industriels et de représentants de la Commission, qui sera déployée en cas de rupture avérée ou possible de l'approvisionnement en gaz, pour surveiller les flux à l'intérieur et à l'extérieur de l'UE. Dans le texte en question, il y a aussi un volet préventif : il souligne l'importance d'avoir «des infrastructures suffisantes» et de «faire à temps les investissements nécessaires». Bruxelles veut notamment imposer la mise en place «dans les deux ans» d'équipements permettant d'inverser les flux dans les gazoducs. L'objectif affiché est de permettre par exemple aux pays d'Europe de l'Ouest disposant de stocks suffisants d'envoyer du gaz aux pays de l'Est très dépendants des livraisons russes, telle la Bulgarie. Ce qui n'est pas possible aujourd'hui car les «tuyaux» ne fonctionnent que d'est en ouest.