Photo : S. Zoheïr De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani Le Panaf aura été pour Annaba durant les 2 dernières semaines une véritable rupture avec les rafistolages et les bricolages baptisés par les uns et les autres manifestations culturelles. L'indigence et le désert culturels ont fait que tout ce qui apporte un semblant de culture, fût-il primaire, était assimilé à une production à intégrer à un patrimoine déjà mis à mal par une négligence réductrice. Le vide culturel, qui a caractérisé ces dernières années, hormis quelques manifestations de portée internationale telle la rencontre sur les arts plastiques, a donné lieu à une sorte de redéploiement où l'Internet a pris le pouvoir, s'imposant comme la seule alternative. Or, ce moyen, s'il contribue à la formation de la jeunesse en lui concédant quelques bribes de culture, somme toute sommaire et sans réel impact, est parasité par des sites dévastateurs pour ceux qui, noyés dans ce monde virtuel, prennent tout sans se soucier de son influence néfaste sur leur comportement. Le Festival panafricain, dont une partie s'est déroulée à Annaba, a été une sorte d'oasis où la culture, la vraie, l'authentique avec ses différentes expressions, a été l'invitée d'honneur, respectée et adulée par un public qui a communié et vibré jusqu'à faire corps avec elle. «C'est notre invitée spéciale, nous dit, heureux, un des spectateurs venus assister au théâtre de Verdure à une des représentations. Vous savez, ici à Annaba, nous avons le sens de l'hospitalité. Cela fait longtemps qu'on n'a pas organisé pareille manifestation et donc nous sommes heureux de faire sentir à cette grande dame qu'est la culture qu'elle est ici, chez elle, elle n'a pas besoin d'être invitée.» Un autre dira que ces représentations lui ont fait revivre les années fastes de la culture qui était dans la rue, à portée du public, un public qui avait appris au fil des ans à la côtoyer, à vivre avec elle et à adopter des comportements l'intégrant dans sa vie quotidienne. «Peut-être qu'avec le Panaf, c'est le retour définitif de la culture qui nous a quittés il y a des années parce que nous l'avons boudée et ignorée. C'est normal qu'elle ne nous reconnaisse plus. Aujourd'hui que nous avons réussi à la convaincre, j'espère que ce sera la relance qui permettra de la pérenniser pour qu'elle fasse partie de notre quotidien. La culture sera notre compagne de tous les jours, elle fera partie de nos mœurs et on reviendra à la bonne vieille époque, les soirées théâtrales, les concerts de musique, la projection de films avec débats, les galeries d'exposition, les musées. Bref, ce sera la vie dans toutes ses manifestations.»Le public annabi, épris de culture, se déplace chaque soir au théâtre en plein air, il retrouve ses réflexes d'antan et ses anciennes habitudes mises au jour par le Panaf ; il s'installe sur les gradins et est impatient de voir se produire tel ou tel artiste ; l'ambiance est spéciale, la gaîté et la joie se lisent sur tous les visages ; on est là pour profiter et apprécier. Toutes les soirées ont fait «espace comble», puisque, même debout, on tient à assister pour passer de bons moments et pouvoir ainsi dire qu'on y était. Côté organisation, les plateaux prévus à la plage Saint-Cloud ont tous été transférés au théâtre en plein air pour des impératifs de sécurité. «Il était très difficile, voire impossible, de canaliser et de contrôler ce nombre impressionnant de personnes qui viennent toutes en même temps. Passé le premier plateau que nous avons dû gérer avec les moyens du bord tout en veillant à la sécurité des spectateurs, nous avons décidé de le supprimer et de tout programmer au théâtre en plein air», nous a déclaré un des organisateurs. A la direction de la culture, on se dit très satisfaits de l'impact qu'a eu le Festival panafricain à Annaba, qu'il s'agisse des plateaux qui y ont été organisés ou de ceux d'Alger. «C'était vraiment la fête, nous confie un des chefs de service responsable du Panaf à Annaba. Nous avons vu un public merveilleux, un public connaisseur qui sait apprécier et qui a mis à l'aise tous les artistes, qu'ils soient locaux ou étrangers. C'est ce qui a poussé ces derniers à se surpasser en donnant le meilleur d'eux-mêmes. Nous sommes heureux qu'on nous ait concédé une partie du Panaf, ici à Annaba. Cela fouettera la culture dans cette région du pays connue pour avoir été l'un des phares de la culture universelle pour avoir abrité dans ses murs l'illustre saint Augustin.» Le directeur de la culture, lui, pense aux jours à venir pour combler le vide laissé par le Panaf en cette période d'été. Certes, il y a déjà tout un programme mais celui-ci ne peut plus rivaliser avec les manifestations qui ont eu lieu ces derniers temps ; il faudrait tout revoir pour présenter au public quelque chose qui se rapprocherait du niveau auquel il a été habitué. «Nous sommes en train de tout revoir pour concocter de nouvelles recettes qui, nous l'espérons, satisferont le public annabi, devenu aujourd'hui très exigeant après la tenue du Panaf ; nous espérons réussir cette entreprise difficile, difficile parce qu'il s'agit de culture et pas de mécanique», déclare un responsable au niveau de la direction de la culture.