Entretien réalisé par notre correspondant à Oran Mohamed Ouanezar LA TRIBUNE : Que pensez-vous de l'institution d'un Festival du film arabe à Oran ? Sid-Ahmed Agoumi : Je pense que c'est une excellente chose que de créer ce festival du cinéma, installé à Oran de surcroît. Je pense que c'est dans l'esprit de la décentralisation culturelle et artistique. Je trouve également que le cinéma algérien a une chance extraordinaire de se confronter à d'autres cinémas. Ça lui permet de s'ouvrir à d'autres horizons, car on ne peut évoluer qu'en se comparant. Et j'espère que le festival va être institutionnalisé. Pensez-vous que le festival évolue dans le bon sens ? Oui, je le pense vraiment. En fait, l'édition de cette année est déjà bien supérieure à l'année dernière. Devrait-on tenir une édition complémentaire du festival du film algérien au sein du Festival du film arabe ? Non, je ne le pense pas. Pour tenir un festival du film algérien, il faut qu'il y ait production et au minimum une moyenne de 10 à 20 films par an. Cela pour permettre une bonne sélection. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Moi, j'opterais plutôt pour une semaine ou une quinzaine du film algérien. Cela contribuerait, à coup sûr, à amener les autorités au plan local à améliorer les structures existantes et à mieux les gérer. Ou encore à en créer d'autres plus adaptées. Celles qui existent sont excentrées, même restaurées. Il faut arriver à créer et à multiplier les espaces et complexes culturels pour permettre à un père de famille de sortir avec ses enfants et sa femme à moindre coût dans des espaces de convivialité. Comment voyez-vous la consommation culturelle dans notre pays ? Les gens ne sortent plus comme avant pour voir un film, ou voir un spectacle. C'est là que nous sommes interpellés justement. Il faut sortir nos jeunes de ce carcan de la consommation télévisuelle. C'est une consommation passive. Il faut arriver à en faire un consommateur actif qui participe. Et si on vous proposait un poste de responsabilité quelconque dans le secteur de la culture ? J'en ai fait l'expérience dans les institutions culturelles du pays pendant une vingtaine d'années. Nos institutions culturelles sont dans un état de déficience du point de vue économique. Elles ne sont pas rentables. Moi, je suis un créateur. Si je dois gérer le passif et mes prédécesseurs, alors je refuserai, bien que certains soient talentueux. Et votre expérience en France ? J'ai beaucoup travaillé en France et partout en Europe et même au Canada. Ça m'a apporté beaucoup et j'ai appris une foule de choses dans mon métier. J'ai vécu d'autres expériences, vu d'autres techniques. Ça ne peut être qu'enrichissant. Quel est votre sentiment vis-à-vis de ces néo-producteurs qui inondent le marché ? Moi, ce qui me répugne, ce sont ces pseudos qui s'autoproclament auteurs et réalisateurs. Il y a aussi des mots qui me révoltent quand on me dit qu'on se rabaisse au niveau du public. C'est une insulte à l'intelligence d'autrui et c'est monstrueux. Dans ma carrière, j'ai appris qu'il faut être à la hauteur de l'intelligence du public. On parle beaucoup d'un mauvais virage pour le cinéma égyptien. Qu'en pensez-vous ? Je pense que le cinéma égyptien a connu son heure de gloire. Les Egyptiens traversent une étape difficile. Seulement, il existe une belle relève, notamment dans le théâtre que nous ne voyons pas dans nos télévisions. Une relève décriée dans son pays, mais qui fait son bonhomme de chemin. En Syrie par exemple, il y a un cinéma extraordinaire. C'est un cinéma ouvert au monde et aux étrangers. Il y a quelque temps, ils m'ont honoré et je les remercie de m'avoir rendu hommage. Comment trouvez-vous Oran ? Je la trouve très épanouie et accueillante et son public très chaleureux.