De notre correspondant à Oran Samir Ould Ali Un certain nombre d'Oranais, plus privilégiés que les autres, ont découvert en ce Ramadhan les joies des bains de nuit. «Beaucoup se rendent aux Andalouses où les plages sont éclairées», témoigne Amine, 35 ans, dont les amis partent régulièrement se rafraîchir après le f'tour. Contrairement aux autres plages, celle des Andalouses offre, en effet, l'avantage d'une bonne lumière qui permet à de nombreux estivants, dont des émigrés qui ont choisi de passer tout ou une partie du mois de Ramadhan à Oran, de profiter des bienfaits des baignades nocturnes.Pour la majorité des jeunes, toutefois, qui n'ont pas la possibilité (et souvent l'envie) de descendre à la plage, il reste les traditionnelles soirées dans les cafés ou les cybercafés, des jeux de cartes ou des parties de dominos entre potes près de la maison. «Pourquoi se rendre au centre-ville quand tu n'as ni cinéma ni théâtre, ni aucune autre activité culturelle qui vaille le déplacement ?» s'interroge Kacem, un jeune habitant du quartier de Point du jour. Une interrogation légèrement teintée de mauvaise fois puisque, cette année, la Cinémathèque comme le Théâtre d'Oran ont fourni des efforts pour assurer toutes les soirées de Ramadhan. Avant même le début du mois de jeûne, les responsables des deux structures culturelles ont rendu publics des programmes prévoyant des spectacles pour toutes les soirées. «Peut-être, concède notre interlocuteur. Mais je ne suis pas sûr d'apprécier les films projetés par la Cinémathèque ni les pièces de théâtre dont nous n'avons, d'ailleurs, pas l'habitude. Je préfère les DVD que je loue à la vidéothèque du coin.» A Oran, la majorité des jeunes (et souvent des moins jeunes) entament leurs soirées par une virée dans les cafés pour un serré afin d'accompagner les premières clopes. Une heure ou deux et cinq ou six cigarettes plus tard, certains se rendent dans les cybercafés pour de longues parties de jeux en réseau ou pour tchatcher avec une lointaine copine. D'autres ont rendez-vous dans des mahchachet pour de non moins longues parties de cartes. «On y reste toute la nuit à jouer au rami et à fumer. C'est quand même plus sympa que d'aller se balader au Front de mer et de voir une opulence qui nous est interdite à jamais», affirme un ami de Kacem avec de l'amertume dans la voix. «Beaucoup de gens dépensent des milliers de dinars en une soirée de réjouissances alors que la majorité d'entre nous ont du mal à s'acheter un paquet de cigarettes. C'est ça l'équité, la juste répartition des richesses ?», demande-t-il encore. Les années passent et les choses demeurent en l'état pour la majorité des Oranais : de grandes difficultés à assumer les dépenses générées durant le mois, l'angoisse de celles qui attendent et des soirées qui permettent rarement d'échapper à ces soucis.