Photo : Lemili Par A. Lemili La question de l'utilisation dans la production de boissons sucrées d'un produit réputé cancérigène est récurrente. Sauf qu'elle n'est visible qu'au cours du Ramadhan. Et ce n'est que durant ou à l'issue de ce mois, depuis ces dix dernières années, que les titres de presse évoquent d'une manière plus ou moins sérieuse le sujet. L'annonce assez récente dans l'est du pays d'une prise par les services de répression des fraudes d'une quantité de plus de 600 litres de limonade contenant du cyclamate n'est en fait qu'une énième répétition de ce qui s'est déjà passé en septembre de l'année écoulée à Annaba et qui s'est sans doute également déroulé dans bien d'autres villes et qui n'a pas été éventé. La nocivité du cyclamate, découvert il y a près d'un siècle, n'a, en réalité, jamais été établie à ce jour et ce, au même tire que bien d'autres édulcorants. Toutefois, cela n'a jamais empêché les pouvoirs publics et le ministère du Commerce notamment d'instruire les producteurs de mets et boissons sucrés au respect du dosage autorisé, comme partout dans le monde. Or, la fluctuation, voire la hausse, du prix du sucre sur le marché allait forcément conduire les limonadiers à faire usage de cet édulcorant lequel, au demeurant, détient l'avantage de permettre un sucrage du produit grâce à une infime quantité en comparaison avec le sucre ordinaire. Dès lors, le rapport/prix qualité devenait le dernier souci des producteurs qui choisiront de passer de l'exception (quoique strictement prohibée) à la règle en utilisant le cyclamate comme support essentiel de leur composition.Le préjudice dans ce cas de figure comptant double : exposer des consommateurs à certains risques, dont le cancer de l'appareil urinaire, et contourner ou échapper à une taxation réelle. Autrement dit, une fraude fiscale confirmée. Le paradoxe dans cette situation est que ce n'est qu'à la faveur d'opérations ponctuelles de contrôle inopiné des brigades des DCP que sont mises au jour ces infractions plus graves qu'elles ne semblent le paraître sur le papier dans la mesure où elles mettent très sérieusement en cause la santé des individus. Or, c'est en l'absence de normes de gestion de base que peuvent se multiplier de tels écarts et de tels comportements interlopes des limonadiers. Il suffirait, dans un pays où les normes existent et sont immuables, au lieu de ces fameuses descentes à la «Eliott Ness» dans des caves pour vérifier des cuves ou prendre un échantillon de produits prêts à la consommation pour faire établir la fraude, de procéder à la vérification des registres comptables pour avoir une idée précise de l'utilisation de tous les éléments constitutifs d'un produit consommable. Et s'il existe une comptabilité des chiffres, il en existe également une autre physique, une gestion des stocks, un état des inventaires. Néanmoins, il relève du vœu pieux que les producteurs s'astreignent à une telle rigueur de gestion et que ceux qui sont censés les contrôler veillent et maîtrisent leurs attributions. Sur le plan économique, un tel dossier pèse évidemment très lourd sachant le manque à gagner de l'Etat dans la multiplication de ces pratiques, notamment le recours aux édulcorants… des additifs moins coûteux, comme il a déjà été souligné, et leur substitution au produit obligatoirement qualifié. Mais la facture sera encore plus lourde au bout d'une vingtaine ou d'une trentaine d'années quand les conséquences de la consommation, du moins à une cadence régulière et constante, des édulcorants, dont le cyclamate, se manifesteront dans les organismes de nos concitoyens. Car il faudra bien que l'Etat prenne en charge les populations concernées.