De faux limonadiers fabriquent le rideau fermé. Pour les contrôler, il faut un mandat de perquisition… Dans la plupart du temps, ils présentent une déclaration sur l'honneur dûment remplie et signée par l'APC certifiant qu'ils n'exercent aucune activité Une salutaire psychose vient de s'installer dans la région de Batna. Tout a commencé après la saisie au sein de certaines limonaderies de la localité d'énormes quantités de cyclamate, un produit chimique cancérigène, utilisé comme matière de substitution au sucre entrant dans la composition des boissons gazeuses. La découverte a été faite lors de la dernière campagne menée par les forces combinées, dans le chef-lieu de la wilaya de Batna, dans le cadre de la lutte contre la criminalité. Du coup, l'opinion publique n'a pas tardé à établir, par un raccourci vite fait, un rapport entre l'utilisation du cyclamate dans la fabrication de boissons gazeuses et l'augmentation du nombre de cancéreux dans la wilaya. L'inquiétude est à son paroxysme et la boisson gazeuse est observée d'un œil méfiant. “La réglementation algérienne interdit son utilisation. Le cyclamate est un édulcorant qui n'est pas autorisé dans la fabrication des denrées alimentaires”, explique un responsable de la direction du commerce de la wilaya. Tous les fabricants ou producteurs de boissons gazeuses et non alcoolisées, assure-t-il encore, ont été informés de la toxicité de ce produit chimique pour l'organisme lors des journées d'information que nous avons organisées à leur profit. La contrefaçon concerne tous les secteurs d'activités économiques. On y recourt, soit pour majorer ses profits, soit pour rester compétitif sur un marché de plus en plus concurrentiel. Souvent, quand le système de régulation économique est archaïque, comme le cas chez nous, la santé publique est sérieusement menacée. À notre question si le cyclamate est vraiment cancérigène, notre interlocuteur, mesure ses propos et préfère parler d'un produit qui “n'est pas autorisé”. Pourtant, déjà dans les années 1960, des études avaient abouti à la conclusion que le cyclamate était cancérigène chez le rat. Une découverte qui a conduit à l'interdiction du produit dans certains pays, notamment aux Etats-Unis. Sollicités, des médecins et des chimistes de Batna furent catégoriques sur la caractère cancérigène du cyclamate lorsque la dose est exagérée. Abordant le volet lié à la protection du consommateur et au contrôle des denrées alimentaires, notre interlocuteur nous apprend qu'une soixantaine d'unités de production de boissons gazeuses et de boissons non alcoolisées inscrites à travers le territoire de la wilaya de Batna se soumet à un contrôle périodique. L'hygiène, les conditions de production et l'étiquetage sont périodiquement vérifiés. Pour justifier le fait que les éléments de la gendarmerie et de la Sûreté aient saisi, en une seule descente, toutes ces quantités de cyclamate, au niveau de la direction du commerce un peu contrariée, on a des explications. “Ces pseudo limonadiers fabriquent à rideaux fermés. Pour les contrôler, il faut un mandat de perquisition… Dans la plupart du temps, ils présentent une déclaration sur l'honneur dûment remplie et signée par l'APC certifiant qu'ils n'exercent aucune activité”, nous explique un cadre. “Devant ce cas de figure, nous n'avons pas le droit de les contrôler”, précise-t-il. Effectivement, les subterfuges ou les moyens ingénieux pour échapper au contrôle sont nombreux et pour les coincer, les contrôleurs devraient s'adapter à l'imagination de ces criminels. Il y a quelques années, les professionnels de la filière algérienne des boissons non alcoolisées avaient prévenu les consommateurs de vérifier l'origine des sodas avant de les acheter. En effet, une dizaine de marques veille à respecter les normes de production quitte à faire des sacrifices sur le prix de vente. En effet, derrière un bas prix peut se cacher un grand danger sur la santé. B. Boumaïla