Photo : Riad Par Fella Bouredji Qu'est-ce qui manque à l'université algérienne ? Une question qui a été posée à plusieurs étudiants, rencontrés dans les halls de nos facs, sur internet et autres espaces fréquentés par des jeunes… Certains répondront avec légèreté et dérision, d'autres avec un peu plus de sérieux… en ayant gros sur le cœur ! Mais les témoignages recueillis convergent tous vers les mêmes constats et problèmes qui peuvent être résumés en deux points essentiels et impératifs. Pas assez de sécurité Qui n'a pas encore en mémoire le triste événement qui a secoué les esprits en septembre 2006 ? Le jour où Manel, jeune étudiante pleine de vie, a été affreusement assassinée au grand jour à l'université de Bab Ezzouar. Il ne s'agit malheureusement pas du seul exemple de violence dans nos universités. «Comment parler encore de sécurité quand on voit que les agents sont amis avec les voyous qui circulent librement à la fac ?» c'est le constat fait par Mejda, étudiante à l'EPAU. Sabrina, étudiante en licence d'anglais à Bouzaréah, explique : «On peut se procurer du shit très facilement derrière le bâtiment… et la majorité des personnes qui passe leurs journées sur le gazon ne sont même pas des étudiants… On n'est pas dans un véritable espace de savoir.» Les témoignages sur la question sont nombreux. Mais en définitive, c'est le premier élément mis en avant quand il s'agit de montrer du doigt les lacunes de l'université algérienne. Pour d'autres, ce n'est pas le problème sécuritaire qui se pose en premier lieu mais d'autres. Selma, magistrante inscrite à l'école doctorale de français d'Alger parle du manque total de communication (profs/étudiants ou administration/étudiants). Vide et désorientation Interrogée sur un forum Internet, elle explique : «Les étudiants qui arrivent sont chaque année complètement désorientés, la plupart du temps ils ne savent pas où ils vont ou ce qu'ils veulent faire et personne ne leur explique le déroulement des choses.» Kawthar, étudiante en master installée à Paris, explique de son côté, d'abord, sur un ton, plein de légèreté et d'humour que l'université algérienne manque de tout : «de vrais profs, de vrais étudiants, de vrais débats, de vraies salles, de vrais amphis». Sur un ton un peu plus sérieux, elle expliquera son point de vue, qu'elle partage avec de nombreuses autres personnes interrogées : «on est sans cesse dans la morale, comme si l'université était là non pour former mais pour jouer un rôle moralisateur. L'esprit général de l'université est à revoir», selon elle. Ali va encore plus loin : «Je dirais que la médiocrité de certains profs, sans parler du niveau des étudiants, n'est que le résultat d'un système qui est tordu à sa base... Il faut une réforme radicale et de fond et mais elle n'aura jamais lieu, tout simplement parce que c'est voulu.» L'université n'est plus considérée comme un lieu privilégié de la société où savoir et élévation sont les maîtres mots. Les étudiants autant que les enseignants ressentent un vrai vide sur ce plan. Un vide accentué par l'absence de communication et la non-participation des étudiants à une éventuelle dynamique de progrès. Vide et désorientation : la deuxième série des failles citées. Les témoignages sont divers et les lacunes tout autant : pauvreté des bibliothèques, manque d'encadrement, programmes inadéquats, formation incomplète ou imprécise, absence d'espaces et de débats… La liste est, malheureusement, longue, à en écouter les nombreux étudiants rencontrés. Trop longue pour être restituée dans cet article !