Photo : Riad Par Fella Bouredji Mener à bien une carrière universitaire en Algérie n'est pas chose facile. Documentation, problèmes avec les directeurs de recherche, absence de motivation, pas assez d'espaces pour s'épanouir et interminables lacunes de part et d'autre font des carrières de nos jeunes chercheurs des parcours semés d'embûches. D'un département à un autre, d'une université à une autre, les échos recueillis renvoient à une situation générale qui reste à améliorer. Leïla est inscrite à l'école doctorale de français d'Alger et prépare un magistère en littérature francophone. Elle a choisi un thème et un auteur qui la passionnent mais, depuis des mois, elle est confrontée à un problème de taille : la documentation. «On a une bibliothèque assez fournie au département de français de Bouzaréah, notamment pour ceux qui se spécialisent dans la littérature algérienne ou maghrébine, mais pour ceux qui travaillent sur des auteurs contemporains et étrangers, un véritable problème se pose», explique-t-elle. Par l'indisponibilité de plusieurs livres, des étudiants en magistère accuse du retard. Pour pallier ce manque, Leïla et d'autres étudiants, confrontés comme elle aux problèmes de la documentation, retournent vers l'Internet. Quant à ceux qui ont plus de moyens, ils commandent leurs livres de l'étranger ou, au pire, font avec ce qu'ils ont. L'autre problème, selon les étudiants rencontrés dans plusieurs campus, est l'attitude méprisante de certains professeurs. Djamil, étudiant en 2ème année de magistère dans une filière qu'il a voulu tenir secrète pour ne pas se compromettre, raconte son parcours avec des mots quelque peu crus : «Je suis en deuxième année et je cours après mon encadreur depuis des mois pour qu'elle me corrige mon travail. Je lui ai remis 50% de mon travail à corriger au mois de mars dernier, et, depuis, j'attends et je prends mon mal en patience. Les autres étudiants ont avancé parce que leurs encadreurs sont plus disponibles. Je suis donc lésé mais je ne peux rien faire parce qu'on sait tous que, dans nos universités, les profs ont raison quoi qu'ils fassent. Elle oublie qu'elle est payée pour ce travail et elle prend du plaisir à afficher sa supériorité à chaque fois que je lui en parle.» Même si Djamil est dans ses droits, il craint de dénoncer le non-sérieux de sa directrice de recherche de crainte que la situation se retourne contre lui. «J'ai beaucoup de chance d'être en magistère et c'est très important pour moi, je préfère prendre mon mal en patience que de risquer de perdre ma place.» Souad a le même problème avec sa directrice de recherche dans une autre université. «On n'a pas réellement de droit, les enseignants sont souvent condescendants avec nous, ils disent qu'on est déjà chanceux qu'ils acceptent de nous encadrer malgré notre médiocrité», affirme-t-elle. Selon beaucoup de témoignages, un rapport de supériorité démesuré, parfois même du mépris envers l'étudiant démotivent et en font abandonner plus d'un. «Mais, fort heureusement, tous les enseignants ne sont pas comme ça !» précise Ahlem qui a la chance de travailler avec un encadreur réceptif, assidu et motivant. Plusieurs enseignants se démarquent par des attitudes constructives. C'est ceux-là mêmes qui font que l'université algérienne tient le cap malgré ses nombreuses lacunes…