Photo : Riad Par Abderrahmane Semmar Les derniers carrés de la mixité à l'université sont en train de disparaître dans notre pays. En effet, c'est à partir de la rentrée universitaire de cette année que les dernières résidences universitaires mixtes seront fermées et les étudiantes «délocalisées» vers d'autres résidences. L'office national des œuvres universitaires (ONOU) justifie cette décision par les multiples problèmes qui se posent dans les cités universitaires relatifs à la bonne gestion des moyens affectés par l'Etat aux étudiants. Les responsables de cette structure parlent d'une réorganisation de l'hébergement qui leur a été dictée «par des impératifs de gestion et aussi dans le but de sécuriser les jeunes filles». Néanmoins, cette décision n'a pas été accueillie favorablement par les étudiants, notamment les étudiantes qui perçoivent derrière cette mesure un soubassement idéologique. «C'est sous la pression des islamistes que l'ONOU a pris cette décision. La mixité dérange ces esprits rétrogrades qui acceptent à peine que nous étudions à l'université», réagit Lamia, étudiante à l'université de Boumerdès qui participe activement au mouvement estudiantin de cellui-ci, lequel s'est mobilisé pour s'opposer à la décision de suppression de la mixité dans les campus universitaires. Cette décision qui concerne les deux campus de Boumerdès, à savoir la cité universitaire Ziani Lounes qui jouxte la faculté des sciences et la cité dite ex-INH, a suscité la colère et la protestation de tous les étudiants. «Nous n'acceptons pas une réaffectation des chambres de deux cités universitaires qui étaient jusque-là mixtes. Pourquoi cherche-t-on à séparer les filles des garçons ? En quoi cela cause un problème de gestion ?» s'interrogent de nombreux étudiants que nous avons pris le soin de contacter. Pour faire entendre leur voix, les étudiants ont signé une pétition dans laquelle ils réitèrent leur opposition tout en précisant que «le malaise de l'université algérienne ne réside pas dans de telles décisions». Or, samedi dernier, le climat est devenu tendu quand des escarmouches ont éclaté à l'entrée de la cité universitaire, Ziani Lounes, entre les étudiants et les agents de sécurité. A ce moment-là, quelques étudiants essayaient d'ouvrir la porte à leurs camarades. Malheureusement, des blessures graves dans les rangs des étudiants ont été déplorées. «Les agents sont tous des barbus qui nous ont roué de coups en utilisant des barres de fer. Notre transfert dans une autre cité est en réalité une exclusion. Ce qui se passe ici est très dangereux et, cela nous rappelle la période noire durant laquelle notre pays a souffert de l'idéologie islamiste», explique Lamia pour laquelle il ne faut surtout pas céder à cette «islamisation forcée des campus». Il est à souligner que la situation est tendue également dans d'autres centres universitaires du pays. Récemment à Bouira, une bataille a opposé les étudiants affiliés à l'UGEL, organisation estudiantine d'obédience islamiste, à leurs camarades qui ne sont sous la coupe d'aucune organisation. A l'origine de cette bagarre, la mixité dans un restaurant universitaire à laquelle se sont opposés les membres de l'UGEL arguant que nous sommes «une société conservatrice» ! Ces derniers ont voulu imposer leur loi sur la majorité des étudiants qui ne comprenaient pas pourquoi, on ne devait pas mélanger les deux chaînes. Cet épisode renseigne à lui seul sur les avancées inquiétantes du fanatisme religieux dans les campus. Et la fin de la mixité dans les résidences universitaires n'est finalement qu'un pas vers la fondation de ce temple de la vertu, qui remplacera bientôt notre chère université…