Les pays les plus pauvres de la planète, notamment ceux du continent africain, tentent de faire entendre leur voix au sein des grandes organisations internationales comme le G20, nouveau club mondial des décideurs économiques, ou le Fonds monétaire international. La tenue, à Istanbul (Turquie), des assemblées annuelles des deux institutions de Bretton Woods, est pour ces pays l'occasion de réitérer leurs appels à prendre en considération leurs revendications, notamment l'effacement de la dette. Un sujet sur lequel les pays riches en sont restés au stade des déclarations d'intention durant les différents sommets. «Il faut qu'il y ait au moins une place pour le presque milliard d'Africains qui ont besoin d'être entendus.» Cette déclaration, plutôt ce cri du cœur, hier à Istanbul, du ministre camerounais des Finances, Lazare Essimi Menye, en dit long. «Le nombre de places est limité, mais nos partenaires devraient accepter le fait que nous sommes les mieux placés pour leur expliquer ce qui pourrait être le mieux pour l'Afrique», a-t-il ajouté. Selon les agences de presse, il s'exprimait au nom du groupe des pays pauvres très endettés (PPTE), «lobby» des plus démunis au sein du FMI pour négocier une réduction de la dette. Eclipsé depuis un an par la crise des pays riches, ce sujet et celui de l'aide publique au développement n'ont pas eu un grand écho à Istanbul, même si l'institution que dirige Dominique Stauss-Kahn a rappelé l'annonce faite en juillet du renforcement de son aide aux pays pauvres, avec l'annulation jusqu'à fin 2011 du paiement des intérêts qu'ils lui doivent et l'accroissement considérable des prêts à leur intention. Selon les 186 Etats membres du Fonds, cela devrait «satisfaire les besoins croissants de financement des pays à faible revenu, avec une considération pour le caractère soutenable de leur dette». Toutefois, pour les Africains, les pays les plus industrialisés ne doivent pas se contenter de promesses, d'autant que la gestion de leur économie a déclenché une crise financière sans précédent. En décodé, ils sont responsables de cette crise, devenue au fil des mois une récession mondiale. Pour rappel, les pays africains ont été particulièrement touchés par la crise économique, qui a entraîné la chute les prix des matières premières, grande ressource du continent, et celle des envois de fonds par les émigrés africains. A titre d'exemple, la croissance de l'Afrique subsaharienne devrait se limiter cette année à environ 1% contre 5,25% en 2008, a souligné à Istanbul la directrice du département Afrique au FMI, Antoinette Sayeh. Les pays africains veulent croire qu'en dépit de l'amélioration économique attendue, y compris sur leur continent, les pays riches honoreront leur promesse, faite en avril, d'augmenter de 20 milliards de dollars par an leur aide d'ici à 2010. «Nous continuons à penser que ces promesses sont sérieuses et vont être matérialisées par la mise à disposition de financements appropriés», a affirmé le ministre camerounais des Finances. De son côté, l'organisation non gouvernementale Oxfam international a revendiqué hier un plan de sauvetage plus ambitieux en faveur des pays pauvres se basant sur des mesures plus concrètes pour sortir de la crise. «Nous saluons les discussions sérieuses de haut niveau sur une taxe relative aux transactions financières lors des assemblées de ce week-end, mais maintenant il faut des mesures plus concrètes en faveur d'un plan de sauvetage plus ambitieux pour les pays pauvres», a déclaré Bernice Romero, directrice du plaidoyer politique d'Oxfam International. «Le G20 a mandaté le FMI et la BM pour s'attaquer à la crise dans le monde entier, et, pour que cet effort soit efficace, il faut que les décisions impliquent plus qu'une poignée de pays riches», a-t-elle ajouté. S. B.