Phhoto : Riad De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Si, à présent, le gouvernement s'intéresse aux comités de quartier et aux associations dans l'un des points de son plan d'action du quinquennat en cours dans la perspective de contrôle des mouvements sociaux de contestation et de grogne syndicale, dans la réalité, la situation des libertés et les conditions d'évolution hostiles de ces entités censées agir dans des espaces publics libres et bénéficier d'un minimum de moyens rendent leur action peu fructueuse quand elles ne se heurtent pas complètement au mur d'incompréhension et de mépris de l'administration. Suite aux événements d'octobre 1988 dans Alger et sa périphérie, une brève éclaircie de tolérance politique à l'égard de ce genre d'organisation à tendance revendicatrice a fait place à une politique hostile à tout ce qui n'émane pas ou ne se soumet pas à la logique des pouvoirs publics. Une pression insupportable s'abat sur les acteurs associatifs actifs dont beaucoup ont été contraints d'abandonner leurs structures ou réduits à des champs d'action secondaire sans grande influence sur les changements et les centres de décision. La militance est plutôt amoindrie. Très rares sont les voix qui sortent du plat politico-administratif instauré en mode de gouvernance. Leur fougue est aussi ternie par des groupes de militants transformés en caste syndicale par les appâts de la rente et la découverte du luxe à titre gracieux. C'est dans ce sens que le premier ministre, Ahmed Ouyahia, a abordé «le mouvement associatif» dans un discours récent en relation avec l'action du gouvernement tiré du programme du chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika. Des textes de loi seraient prévus pour en modifier d'anciens sur le fonctionnement des associations et des comités de quartier et de village afin de leur faire jouer un rôle de médiateur dans les situations «d'atteinte et de troubles à l'ordre public». L'alinéa qui s'y réfère dans ce plan d'action de M. Ouyahia se rapporte à l'implication des acteurs et cadres associatifs dans la lutte contre les fléaux sociaux, le maintien de «la paix civile, la sécurité des personnes et de leurs biens» et les formes de la criminalité. Selon des militants syndicalistes, il s'agirait d'un autre tour de vis aux textes déjà jugés liberticides qui régissent les associations et les comités de quartier et de village. En Kabylie, les changements intervenus sur la scène politique depuis le cessez-le-feu en 1962 ont eu des incidences sur les structures traditionnelles d'organisation sociale paysanne. Si les autorités ont réussi à placer des membres qui leur sont acquis dans les comités de village en prévision surtout des échéances électorales et aussi dans le but évident de se servir d'eux comme relais du renseignement, les choses ont commencé à changer suivant les mutations et les brèches ouvertes dans le système hermétique en place à partir du début des années 1980. Les «vieux» des comités sont bousculés, d'autres défis de l'époque appellent d'autres figures jeunes. Les questions qui se posent à la collectivité dépassent les problèmes d'assainissement et de réseaux d'AEP, de gaz et d'électricité. Surtout que la démission des pouvoirs publics n'a jamais été sentie aussi forte que ces dernières années, alors que le pays est riche par sa rente pétrolière et donc censé connaître un élan de développement socio-économique. Ces «anciens» se retrouvent ainsi dépassés et poussés vers la sortie par des jeunes parmi lesquels beaucoup d'universitaires et d'intellectuels qui veulent investir et transformer les structures traditionnelles. Les événements du «printemps noir» de 2001 ont tué les espoirs des pouvoirs publics quant à un renouvellement progressif des acteurs associatifs par d'autres du même acabit, dociles et toujours satisfaits de l'action publique menée à l'échelle locale, en provoquant un séisme dans l'organisation ancestrale qui a ébranlé quelques assises du despotisme et emporté la représentation en place «appelée à d'autres missions (!)». Cela dit, le prochain défi de ces comités de quartier et de village serait peut-être de garder leur autonomie à l'égard du pouvoir et d'échapper à l'asphyxie financière. Car les autorités marchandent avec les cadres associatifs l'octroi de subventions pour obtenir leur assujettissement.