Photo : Riad De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad L'assassinat dans l'enceinte de l'université de Mostaganem du professeur en informatique, Benchehida Mohammed, le 18 octobre dernier par l'un de ses étudiants, n'a pas servi à grand-chose en termes de décisions devant être prises à un haut niveau de responsabilité en pareilles circonstances. Même les responsables du secteur se sont montrés avares en condamnation de cet acte abject comme si la perte stupide d'un intellectuel n'avait rien à rajouter à la déliquescence dans laquelle baigne la communauté universitaire. La violence n'émeut plus les concernés parmi les cadres de l'enseignement et de la recherche universitaires même quand cela se passe sous leur toit pourtant dédié à la science et à la tolérance. Cette fois, on se contentera de baptiser un auditorium de l'université de Mostaganem du nom du docteur assassiné à l'arme blanche avant de classer temporairement ce drame qu'on revisitera superficiellement à une autre occasion. On sait que la violence avant d'être un phénomène de société a été d'abord un mode de gouvernance des affaires publiques. Les membres de la communauté universitaire de cette ville ont appelé cette semaine à «une prise en charge immédiate, urgente et sérieuse de ce problème avant qu'il ne gangrène complètement l'université algérienne» et demandent à leurs pairs «de vulgariser et de véhiculer les valeurs morales qui font la noblesse de notre métier et de nos missions de formation et d'éducation des générations futures». L'université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou (plus de 42 000 étudiants) n'a jamais connu de batailles rangées comme celles ayant dominé le conflit entre la direction des œuvres universitaires de Hasnaoua (DOUH) et la coordination locale des étudiants au cours de l'année universitaire 2007-2008. Si la situation insupportable que vivent des milliers d'étudiants suggère toute forme de recours, pacifiques, pour l'aboutissement de revendications légitimes pour une meilleure prise en charge pédagogique, d'hébergement, de restauration et de transport, la manière adoptée par les représentants syndicaux des étudiants a étonné et déçu. Des comportements révolus sans rapport avec le savoir ou l'instruction et classés loin des principes qui fondent le dialogue. Les effets paisibles de la médiation, la compréhension et le civisme en milieu universitaire, ont prévalu. Les nombreuses actions de protestation (grèves, marches, sit-in, etc.) qui ont eu lieu à la fin de l'année 2007 et au début de l'année 2008 ont été émaillées d'incidents graves où la violence a eu son mot à dire. Destructions, saccages, agressions ont marqué plusieurs initiatives estudiantines dans l'enceinte même de l'université. Il se trouverait des voix parmi les étudiants qui justifieraient ces gestes condamnables par la «réaction», accusant la DOUH d'avoir dirigé contre les étudiants des agents de sécurité chauffés à blanc pour les intimider et faire cesser leur revendication. «La normalisation, la caporalisation et l'embrigadement de l'université en usant de moyens et de méthodes de bas étage, dont la destruction des comités autonomes, les intimidations et les agressions des étudiants par des agents de sécurité, l'instrumentalisation de l'institution judiciaire et autres manipulations et restrictions de budgets», écrivait la CLE (18 comités estudiantins) dans une déclaration rendue publique au moment des faits et qui dénonçait l'insécurité grandissante qui règne dans les campus et les cités universitaires ainsi qu'aux alentours (agressions, vols), l'agressivité des agents de sécurité et leur implication dans un conflit syndical opposant des étudiants aux responsables des œuvres universitaires, les «graves menaces proférées à leur encontre par des inconnus en raison de leur engagement syndical et le climat de peur qui prévaut dans les sites universitaires». Et les mesures prises par les responsables locaux et la tutelle au bout de plusieurs mois de pourrissement pour éviter une autre année blanche après celle de 1994-1995 due au boycott scolaire ? Démettre de ses fonctions la directrice de la DOUH, un point c'est tout, comme si tout le mal de l'université de Tizi Ouzou était incarné par une seule personne. Preuve en est que non. Quelque temps après, les étudiants sont revenus à la charge pour manifester leur mécontentement à propos des solutions bricolées par les autorités. Pourrissement ou incitation à la violence ?