De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad La nature et les rapports très souvent difficiles entre la population et les exécutifs communaux n'ont jamais été aussi visibles et bruyants dans la plupart des localités pauvres de Kabylie, depuis la fin du monopole FLN dans le champ politique algérien. Le nombre important d'actions de blocage et de fermeture des sièges d'APC, les lettres ouvertes de dénonciation des élus locaux et même le saccage ou la détérioration d'édifices communaux donnent une idée claire des échanges hostiles qui existent entre l'électeur et l'élu et la perte de confiance placée au départ dans des délégués pourtant choisis plus ou moins librement par la majorité des suffrages. Et, comble de la situation, des conflits pourrissants dans la région. Le rôle de règlement des différends par voie de médiation ou autres revient aux agents de l'administration locale qui sont ainsi blanchis des manquements et des retards sur les questions de développement dont ils portent en principe la grande responsabilité.L'APC d'Azazga (37 km à l'est de Tizi Ouzou) pourrait être citée comme dernier exemple de ce décalage entre les aspirations et la volonté des résidants électeurs et les agissements des membres élus dans une wilaya qui accuse un retard immense en matière de développement. Depuis près plus d'un mois, la tenue du marché pour femmes, deux fois par semaine, au niveau du site du marché hebdomadaire (samedi) est l'objet d'un bras de fer qui oppose un collectif de jeunes et de moins jeunes de la commune d'Azazga et l'Assemblée communale qui a autorisé la multiplication des marchés dans la localité (quatre jours de marchés par semaine !). En guise de riposte à la «sourde oreille» de l'APC après la fermeture du marché les lundis et jeudis précédents par des groupes de citoyens qui ont barré la route aux revendeurs, les mêmes jeunes ont eu recours cette semaine à la fermeture du siège de l'APC. Hier, tôt le matin, des dizaines de personnes ont pris d'assaut le siège de l'APC pour annoncer sa fermeture en signe de dénonciation de «l'entêtement» de ses membres. Alors, quel crédit populaire pourrait jouer encore en faveur d'une APC quand la colère émane d'une dizaine des plus grands villages d'Azazga qui demandent tous de la même voix la satisfaction d'une doléance qu'ils estiment légitime ? Toujours dans la même commune (environ 40 000 habitants), les victimes de «l'expropriation abusive» du tracé de la déviation de la ville d'Azazga (8,4 kilomètres) ont vu le maire leur tourner le dos et se liguer contre eux dans la bataille qui les oppose à la direction des travaux publics de la wilaya. Le comité des victimes qui représentent plus d'un millier d'héritiers ne comprend pas l'attitude du P/APC qui a été, rappellent-ils, un fervent opposant à ce tracé, qu'il défend actuellement, quand il était «dans l'opposition» à l'époque de la majorité FLN. Alors, comment et pourquoi le maire a-t-il changé de position sur un problème qui est demeuré le même depuis son éclatement il y a plusieurs années ? s'interrogent les victimes, hommes, femmes, vieux et enfants, qui défendent tous les jours leurs oliveraies et leurs champs cntre des engins stationnés aux alentours. A ce propos, ce genre de situation de non-concertation a conduit la population à incendier les locaux de l'APC comme cela s'est passé il y a quelques semaines dans la commune de Tirmitine, sud de Tizi Ouzou, au sujet de l'implantation d'un nouveau lycée qui n'avait pas fait consensus parmi les habitants des villages concernés. Ainsi, en plus des divergences nées des clivages partisans au sein des coalitions présentes aux APC et qui aboutissent, souvent, à des blocages répétitifs des assemblées élues, la population paye les factures du sous-développement engendré par l'absence de volonté politique de sortir la région de sa pauvreté économique. Les élus, logiquement issus des communes dont ils sont élus, mesurent-ils les conséquences de leurs actions ?