Le chef de la diplomatie espagnole, Miguel Angel Moratinos, a vu dans l'Union pour la Méditerranée (UPM) un «Barcelone plus». Ce «plus», s'explique dans le sens qu'elle reconduit les objectifs de la déclaration de Barcelone tout en apportant une valeur ajoutée. Celle-ci est représentée par la réalisation de projets concrets et la mise en place d'institutions qui ont manqué au Processus de Barcelone. Ces dernières, sont vouées, selon le président de la République Abdelaziz Bouteflika, à donner un nouvel élan au partenariat dans la région. Le sommet de l'UPM à Paris, a décidé de renvoyer à novembre prochain le débat sur la structuration institutionnelle de l'Union. Le choix d'un site pour le secrétariat général, que se disputent le Maroc, la Tunisie, Malte et l'Espagne, ne connaîtra son règlement qu'en novembre prochain, lors d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UPM. D'ailleurs, lors de visite à Tunis, Moratinos a indiqué que son pays souhaitait accueillir le secrétariat général. Il semble que le roi Mohamed VI ait boudé le sommet de Paris pour avoir perdu espoir de voir son pays abriter le siège de l'UPM. Cette question, quelle que soit son issue, aura fini par mécontenter plusieurs pays. Par ailleurs, les chefs d'Etat présents à Paris ont retenu plusieurs projets concrets et fédérateurs, à savoir des autoroutes de la mer, la dépollution de la Méditerranée, la protection civile, le plan solaire méditerranéen, l'université euro-méditerranéenne… Le problème majeur qui n'a pas été élucidé lors de la réunion est le financement de ces projets. Qui financera par exemple l'opération de dépollution de la Méditerranée dont le coût est estimé à 2 milliards d'euros ? Il est vrai qu'au début le gouvernement français comptait capter une partie des fonds de la politique de voisinage de l'UE, mais la Commission européenne et les grandes capitales ont déjà annoncé ne pouvoir mobiliser plus de 10% de cette enveloppe pour financer de nouveaux projets. L'Union européenne, de son côté, ne prévoit pas, à court terme, d'engagements financiers importants en raison du bouclage de ses équilibres financiers jusqu'en 2013. «Cette attitude n'est pas sans susciter des interrogations légitimes sur la volonté réelle de l'UE de contribuer de manière décisive à la mise à niveau des pays de la rive sud de la Méditerranée. Il est seulement prévu que des ressources devront être mobilisées par les pays concernés pour les projets y compris à travers le recours au marché des capitaux», regrette le président de la République dans un entretien inédit à l'APS. En effet, M. Bouteflika a soulevé un problème essentiel relatif au financement des projets. L'Europe, responsable en premier de l'échec du Processus de Barcelone, espère-t-elle voir les pays du Sud financer les projets ? Cela n'est pas évident lorsqu'on sait que ces pays souffrent de sous-développement. Il semble que le sommet de Paris, en dépit de l'ambiance festive qui l'a entouré, est loin d'apporter des solutions aux questions politiques et autres conflits qui opposent des pays de la rive sud de la Méditerranée. La déléguée générale de la Palestine auprès de l'UE, Leïla Chahid, a mis en garde contre le risque de «mettre la charrue avant les bœufs» en lançant l'UPM sans qu'un Etat palestinien soit préalablement créé. «Comment voulez-vous que nous, qui sommes sous occupation depuis 41 ans, qui aspirons à un Etat depuis 60 ans, nous puissions croire qu'on peut mettre la charrue avant les bœufs, avoir des autoroutes de la mer, avoir la dépollution de la Méditerranée, construire des projets d'environnement lorsque nous ne pouvons pas sortir du périmètre dans lequel nous vivons ?» a-t-elle déclaré. Si le rôle de l'UPM se réduisait à la dépollution de la Méditerranée, seuls les cétacés en tireraient alors profit. C. B.