Photo : M. Hacène Par Ali Boukhlef La brillante qualification de l'équipe nationale de football au Mondial sud-africain remet au goût du jour la relation entre les Algériens et leurs gouvernants. Et pour une fois, la relation n'est pas conflictuelle. Et si elle n'est pas fusionnelle, elle n'a pas opposé les uns et les autres, du moins le temps d'une fête. Mais comment est née cette idylle, pourtant inimaginable il y a tout juste quelques mois ? Comment est-on arrivé à cet idéal où gouvernants et gouvernés chantent une seule et même chanson ? Avant de répondre à ces questions, un élément est indéniable : cette équipe nationale, malgré sa diversité, a réussi à créer un espoir qu'aucun dirigeant, politique ou autre, n'a réussi à faire. Et c'est là qu'avait commencé cette histoire d'amour entre, au moins, la jeunesse, et son identité. Et ce n'est pas rien. Un petit rappel de ce qu'a été cette semaine folle nous permet, probablement, de comprendre l'attitude de cette jeunesse qui a soif de joie et, parfois, de reconnaissance. Les différents résultats positifs des Verts -qui n'ont pas été vaincus pendant dix-huit mois- ont réussi à faire revenir les supporters dans le giron d'une équipe nationale qui gagne de plus en plus en crédibilité. Et la victoire écrasante de la bande à Saadane, le 14 juin 2009 contre l'Egypte, à Blida, avait fait éclater les premières scènes de liesse populaire. Et c'est vite devenu une tradition, puisqu'à chaque apparition de l'équipe, les Algériens, notamment la frange juvénile, expriment leur fierté et leurs soutien. Les jours qui ont suivi la rencontre du 14 novembre au Caire ont fini par transformer le soutien, naturel, à une équipe en une véritable adulation. Il faut relever, ici, que certains médias nationaux ont exagéré en tentant de faire sortir le match de son cadre sportif. Mais l'essentiel étant que l'enjeu de la rencontre a catalysé tous les regards ; c'est normal, puisque l'Algérie est à une rencontre du Mondial. Tout le monde savait que le tour n'était pas joué, que les choses n'étaient pas faciles et que, en plus, les Egyptiens sont rarement sportifs dans ce genre de rencontres. Et l'agression de l'équipe nationale par des Egyptiens survoltés n'a fait qu'empirer les choses. Les jeunes Algériens, soutenus par la presse notamment, crient vengeance et demandent, dès le lendemain, d'aller à Khartoum, où devait se dérouler, quatre jours plus tard, le match d'appui, pour soutenir leur équipe. Mais comment rallier, en masse, une capitale distante de 6 000 km d'Alger et dont le vol coûte 70 000 DA ? Seuls les politiques pouvaient régler une telle question. Là, l'apport du président de la République était important, voire décisif. Puisque, juste après le match du Caire, Abdelaziz Bouteflika a demandé aux responsables de l'Etat de se mobiliser, à commencer par la compagnie nationale Air Algérie. Un véritable pont aérien a été mis en place entre Alger et Khartoum, au cours duquel même les avions de l'armée ont été mis à contribution. En parallèle, les billets du stade étaient pris en charge par l'ambassade algérienne dans la capitale soudanaise, en plus de l'apport de plusieurs sponsors qui ont réussi à ramener le prix du billet à… 20 000 DA, et parfois même moins. Cette mobilisation générale a créé une véritable osmose. Et les relais du pouvoir ont fait le reste, puisque, en quelques secondes, le nom de Bouteflika était sur toutes les lèvres. Tout le monde était content et tout le monde chantait la même chanson : «One, two, three, viva l'Algérie.» Mais rien n'est sûr que cela durera, puisque, si l'équipe nationale de football a fait ce qu'elle devait faire, les jeunes qui l'ont accompagnée sont revenus dans leurs quartiers et villages. Donc, à leur réalité…